Antike im Labor

Kleopatra, Ötzi und die modernen Naturwissenschaften
Essai sur les techniques auxiliaires de l’archéologie par Stephan Berry.

Imhotep ! Imhotep !
Imhotep ! Imhotep !

Aujourd’hui, avec quelques rapides analyses d’ADN et un peu de mesures de C14, on peut répondre à toutes les questions que font surgir les recherches archéologiques. Ah, si c’était si simple … Parce que la mesure du C14 résiduel n’est pas forcément de beaucoup d’intérêt (marge d’incertitude trop grosse ou artefact trop ancien) et que l’ADN découvert sur l’os étudié n’est pas forcément celui dudit os, la technique issue des avancées des sciences naturelles a de nombreuses limites qu’il faut aussi connaître. Ces techniques, leurs utilisations dans des cas concrets mais aussi leurs limites sont l’objet de ce livre écrit en 2012 par Stephan Berry (docteur en biochimie).

Le livre s’ouvre sur un hommage à Pline l’Ancien, préfet de la flotte, érudit et encyclopédiste mort dans l’éruption du Vésuve en 79 ap. J.-C. On retrouvera cet auteur fondamental tout au long de cet ouvrage. Il en est même, avec d’autres auteurs antiques qui se sont intéressés aux choses de la Nature, l’une des scansions. La seconde rythmique est donnée par les encadrés qui parsèment les chapitres et qui ont pour but de préciser des notions telles que la génétique humaine ou la spectrographie de masse.

Le premier chapitre (sur les huit que compte l’ouvrage) explore ce qu’il est possible de faire à l’aide de techniques variées dans le domaine de la nourriture. Comment on peut reconstituer le contenu des amphores ou des lampes à huile grâce à la porosité de la céramique ou comment grâce à la génétique, on peut remonter aux céréales anciennes (et à leur géographie) sont deux des questions auxquelles l’auteur permet au lecteur d’apprendre des quantités de choses avec un maximum de clarté. La domestication des animaux et le régime alimentaire (grâce au contenu des momies par exemple) sont aussi les objets de ce chapitre. S. Berry signale la réutilisation ou l’adaptation de recettes antiques dans le domaine brassicole (p. 28).

Le chapitre suivant passe de la génétique des plantes à celle des humains, avec pour points saillant l’origine des indo-européens après la fin de la dernière glaciation (p. 35), en liaison avec la question de la langue. Il est fait mention des travaux portant sur l’origine des Etrusques (en utilisant la répartition par haplogroupes), tout en précisant que s’ils sont un élément à prendre en compte, ils ne peuvent à eux-seuls donner une solution définitive. La paléogénétique a aussi été utilisé dans l’étude de la plus célèbre momie non-égyptienne, Ötzi. Elle démontre (p. 49) qu’il n’appartient à aucun sous-groupe aujourd’hui encore existant du point de vue de son ADN mitochondrial …

Le troisième chapitre s’éloigne des humains pour considérer leur habitat et ce que l’analyse chimique des restes d’habitats peuvent apprendre à l’archéologue. Il est ainsi question des pierres des pyramides du plateau de Gizeh, des briques du camp légionnaire de Mayence mais aussi des avancées permises par les satellites (quand elles sont vérifiées par des fouilles surtout, p. 65). A l’image satellitaire, il faut aussi ajouter le radar, le géoradar et la magnétométrie qui permettent de reconstituer le paysage antique (Tyr, Alexandrie) même s’ils ne permettent pas par contre de coller des étiquettes sur les structures ainsi découvertes.

S. Berry s’attarde ensuite sur l’archéométallurgie et aux artefacts produits par le feu, où là encore l’analyse chimique peut être riche d’enseignements, comme par exemple pour ce qui est de débusquer les fausses statuettes de Tanagra (déjà fabriquées quand ces dernières étaient recherchées à la fin du XIXe siècle). Dans la collection berlinoise, il y a tout de même 20% de faux … Il est bien entendu aussi question de monnaies (p. 84-88).

Le sixième chapitre, dont le titre renvoie à Tintin, est centré sur la pharmacologie et la toxicologie. Il y est question de ce que les momies égyptiennes contiennent, comme produits de momification comme les autres, plus inattendus, comme la nicotine (alors que le tabac est un produit américain). L’auteur avance quelques explications, assez logiques (p. 97). La possibilité de la contamination moderne est ici la leçon à retenir (p. 96-97), avec le fait que l’on teste vraiment toute les nouveautés en matière d’imagerie médicale sur les momies. Dans ce même chapitre, il est aussi abordé la méthode de fabrication des papyrus ainsi que l’origine des produits de teinture (p. 106-109).

L’avant-dernier chapitre revient du côté du corps humain avec quelques considérations sur les maladies dans l’Antiquité. La peste (véritable ou supposée) y tient le premier rôle, avec un éclairage particulier sur la peste à Athènes qui emporta Périclès. Le passages des maladies des animaux à l’homme, tout comme les parasites, font partie du chapitre avant que l’auteur ne reviennent à Ötzi et aux analyses de son corps pour déterminer les causes de sa mort (Toutankhamon sert de point de comparaison) et son propos passe ensuite à la saisonnalité de la mort (à différentes époques), avec comme conclusion la dangerosité de vivre en ville, où trop de promiscuité conduit à une très grande mortalité juvénile dans la famille de l’empereur Auguste (p. 126).

Le dernier chapitre, qui contient la conclusion, est la suite logique du septième chapitre en passant à l’influence du milieu sur l’homme. Comme l’Homme n’a pas attendu le XXe siècle pour modifier son environnement, il est beaucoup de choses à dire. La tannerie créé des rejets, mais le travail de la mine aussi. En Jordanie, les animaux du Wadi Faynan ont encore aujourd’hui plus de cuivre dans leur sang que la normale, alors que l’exploitation du cuivre dans la vallée s’est arrêtée il y a 1500 ans (p. 133) … La vulcanologie et la climatologie sont les deux derniers thèmes abordés par S. Berry, toujours dans une optique antiquisante.

La première chose qui change, et de manière agréable, dans ce livre par rapport à d’autres ouvrages de vulgarisation ou pédagogiques, c’est que l’auteur cite les chercheurs et les inventeurs, tant archéologues que physiciens ou chimistes.  A cela s’ajoute une volonté pédagogique toujours renouvelée, parfois aidée d’un peu d’humour (p. 27, p. 72) qui fait de ce livre un plaisir à lire et qui permet l’assimilation de la quantité d’informations que nous livre l’auteur. Chaque technologie y est décrite, avec des exemples d’application mais surtout en expliquant quelles sont ses limites (on ne peut pas utiliser la technique du C14 pour des artefacts trop anciens ou trop jeunes, ou que la marge d’erreur peut annihiler son apport espéré). C’est donc un essai sur les techniques et sciences auxiliaires de l’archéologie, mais qui pour autant n’est de loin pas déconnecté de l’historiographie de l’archéologie (importante remarque sur le mésolithique, mal compris, p. 34) même s’il peut paraître un peu en retard sur la « nouvelle mode » de Google Earth en 2012 (p. 63). L’érudition de l’auteur est visible à chaque page (et plus encore à la p. 90 sur la cannelle) et fait oublier les petites redites (p. 95).

Un tableau très intéressant des possibilités actuelles des sciences et techniques en faveur de l’archéologie, pour le professionnel comme l’amateur éclairé.

(la thermoluminescence des céramiques, à jamais ma préférée … 8)

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