NSK

From Kapital to Capital
An event of the final decade of Yugoslavia

Direct, brutal.

Recueil d’articles et de photos sur la première décennie du collectif artistique slovène Neue Slowenische Kunst, dirigé par Zdenka Badovinac, Eda Čufer et Anthony Gardner.

Fondé en 1984, le collectif Neue Slowenische Kunst (NSK) est l’union des groupes Laibach (musique et arts plastiques), IRWIN (peinture) et Gledališče sester Scipion Nasice (Théâtre des sœurs de Scipion Nasica, théâtre). Ces groupes ont pour principe directeur le rétro-avant-gardisme, principe expliqué dans ce livre qui accompagne l’exposition qui a été consacrée au collectif NSK à la Moderna Galerija de Ljubljana en 2015.
Menant des actions conjointes ou agissant séparément, les groupes formant NSK existent toujours (le groupe de théâtre a cependant changé plusieurs fois de nom, selon les projets), donnant naissance à plusieurs sous-groupes, parmi lesquels : Novi Kollektivizem (design), Retrovision ( films et vidéos), Builders (architecture) ou encore le Département de philosophie pure et appliquée (philosophie).

Très richement illustré, ce livre de 500 pages rassemble des articles écrits entre 1980 et 2015 ayant attrait à la période 1980-1992, soit entre la fondation de Laibach à Trbovlje et le tournant de l’année 1992, un an après l’indépendance de la Slovénie et l’année du début du projet « NSK State in Time ». Le livre se décompose en plusieurs parties. La première parle des années 1980 à 1984, qui voit l’émergence des trois groupes fondateurs. Il y est question du scandale des posters à Terbovlje, de la répétition en Histoire, de la Rétrogarde comme une avant-garde alternative (sans y appartenir, à cette alternative, pour Scipion Nasica, p. 16) ou du graffiti dans l’espace culturel slovène. La seconde partie se concentre sur les années 1984-1992 avec des articles sur le post-modernisme, les différents projets des groupes, une approche psychanalytique du scandale provoqué en 1987 par le projet de poster accepté par la Ligue yougoslave socialiste pour la jeunesse (reprenant un poster nazi), ou encore un échange entre les philosophes Tomaž Mastnak et Slavoj Žižek (qui ne signe rien moins de cinq articles du recueil).

La troisième partie est une série d’articles critiques sur NSK, parfois écrits par des membres même (Eda Čufer par exemple), analysant  par exemple la pièce de théâtre Baptême à l’ombre du Triglav (les deux articles, p. 147-152), la mimésis comme stratégie de résistance ou les Lumières chez Laibach. Le chapitre suivant contextualise, avec un point de vue qui est celui du XXIe siècle, l’apparition de NSK. Y sont étudiés les manifestes et les programmes du collectif, l’esthétique de la parodie dans l’URSS finissante, la sur-identification en Amérique latine ou bien sûr la scène culturelle slovène dans les années 80.

La partie suivante présente une grande quantité de sources primaires : des manifestes, un règlement intérieur, la transcription d’un entretien télévisuel, entre autres. Puis le volume s’achève sur une chronologie, un glossaire, une présentation succincte des groupes formant NSK, des appendices (sur la liste des expositions et un texte de Tomaž Mastnak), un index, la liste des traducteurs et une bibliographie.

Sur la forme, le livre est beau mais sa lecture n’est pas aisée : les pavés sans aération que sont les différents articles n’aident pas le lecteur à comprendre des textes qui sont parfois ardus et nécessitent une très grande concentration. Cette complexité rencontrée parfois dans les textes, elle n’est pas annoncée dès l’introduction, où les auteurs simplifient trop la Seconde Guerre Mondiale dans les Balkans et la situation en Bosnie en 1992 (p. 9). De même, dire que tous les théâtres d’Etat en Europe sont nationalistes, c’est aller très vite en besogne (p. 14). Nous ne suivrons pas plus en ce qui concerne la fin du rock et de l’opéra (p. 380). Mais une fois dans le corps du livre, le lecteur intéressé en aura pour son argent, avec une très belle diversité d’informateurs et un déluge d’information : le lien Laibach-Đorđević-Ulay/Abramović (p. 34), comment fonctionne l’autogestion yougoslave et en quoi le mouvement punk révèle le cynisme quotidien de ce système (p. 110-112), comment la présence du régime en Yougoslavie  est acceptée comme l’est un handicap (p. 127), que le turbo-folk est un style musical déjà ancien (p. 166), comment Baptême à l’ombre du Triglav se place dans son époque et comment est né le projet (p. 238, avec son rapport avec F. Prešeren, le poète national, et p. 363).

Le contexte, tant slovène que yougoslave, a bien sûr une grande importance. Depuis 1974, la Yougoslavie est une fédération (p. 359). Le pays est en quarante ans passé de l’autogestion planifiée à un retour du capitalisme (à partir de 1971, p. 360), tandis que le front n’est pas non plus uni contre le socialisme. Une société civile se fait jour pendant les années 80 en Slovénie, dans laquelle NSK trouve une place. Mais parallèlement, la fédéralisation n’a pas arrêté la montée des nationalismes en Yougoslavie et la mort de Tito en 1980 va même permettre leur accélération. Mais les différents auteurs nient que NSK ait pu jouer un rôle dans l’indépendance slovène (p. 365 et 450). Pour les auteurs, NSK est beaucoup de choses, comme par exemple une réponse au présent perpétuel (déjà, en 1988, p. 183) ou une interrogation par l’imitation de ce qu’est la Slovénie, mais ne préfigure en rien la Slovénie indépendante.

C’est donc un livre pour un lecteur déjà averti, et qui veut l’être encore plus. Il lui faudra coller ensemble les éléments qui lui parviendront par différents canaux à la lecture de ce livre à la lecture peu aisée, nécessitant même une certaine endurance. Mais le tableau ainsi obtenu vaut le coup, et le lecteur voit se déployer devant lui un vaste panorama allant de l’industrielle Trbovlje à l’Académie des Beaux-Arts de Ljubljana en passant par la Place Rouge à Moscou, lieu de l’action hommage à K. Malevitch Black Square on Red Square (p. 405). Un mouvement artistique particulier dans un pays qui ne l’était pas moins, avant de n’être plus du tout, en 2003 (ou en 1992, selon le point de vue).

 (« Qu’est-ce que cela signifie ? » est donc une question taboue depuis les années 60, p.164 … 7,5)

Le métro

Inconscient urbain
Essai sur le métropolitain parisien de Luka Novak.

Neurones et synapses ?

Dans ce tout petit livre de 75 pages, Luka Novak (auteur, éditeur, politicien et homme de médias slovène) décrit le métro, un moyen de transport sans lequel il n’y aurait selon lui pas d’urbanisme.

L’auteur tire en partie le propos de son livre de son expérience, ayant passé une partie de sa jeunesse dans les années 70 à Paris. Mais il est très loin de s’en contenter, avec quelques apports plus intellectuels que sensoriels à chercher parmi les penseurs du langage, par exemple.

Passée l’introduction sur la place du métro dans le cinéma, l’auteur décrit son expérience au début des années 70 à Paris, à la découverte de nouvelles lignes, de nouveaux tunnels, de nouvelles rames, à l’affut de fentes dans les tunnels. Dans le second chapitre, l’auteur compare le métro parisien à l’édification d’une autoroute au-dessus du Bronx à New-York dont l’effet a été ségrégationniste, séparant la population enjambée du reste de la ville (qui ne possède pas de vrai réseau de métro selon l’auteur, car sans connexions entre les lignes). Au contraire (troisième chapitre), à Paris, le métro est un système de transport démocratique, desservant chaque quartier et structurant son inconscient en termes lacaniens (p.28).

Dans le chapitre suivant, l’auteur veut démontrer que le métro parisien n’est pas fonctionnaliste (à la différence du londonien, p. 33 ou du tokyoïte, p. 40). L. Novak fait ensuite un retour au sens, avec l’odorat. Jeune il appréciait beaucoup l’odeur du caoutchouc et de la vieille terre des tunnels, réfutant l’idée de puanteur. Pour l’auteur, les passages (à Paris ou à Milan par exemple) sont les ancêtres du métro (il s’appuie sur ce point sur W. Benjamin, p. 49). Mais pour L. Novak, le métro n’est pas seulement un inconscient, il est aussi un langage au sens de Wittgenstein. Il a révélé le sens de la ville (p. 61), son auto-réflexion. Le métro a abolit le hasard (p. 62).

Il n’y a donc (dernier chapitre) pour l’auteur pas de vraie ville sans métro ou sans tramway. L’économie mondiale en est même fortement dépendante (les traders doivent bien rejoindre Manhattan).

Le livre aurait mérité des développements plus amples, mais les idées maîtresses surnagent sans difficulté : sans réseau structurant de transports en commun, pas de métropole et le sous-sol révèle la surface. Ce livre montre aussi l’instruction de l’auteur, familier de la philosophie du XXe siècle et du cinéma (d’où sont tirés de nombreux exemples). Le problème c’est que le concept vole en escadrille et que du coup on s’approche dangereusement d’un alignement de noms, et si certaines phrases sont percutantes, le lecteur continue de s’interroger sur leur validité. La quatrième de couverture nous annonçait de l’humour, mais nous ne l’avons pas vu …

Néanmoins ce livre garde de l’intérêt dans ce qu’il permet au lecteur, sans aller jusqu’au structuralisme, de se faire une idée de comment les infrastructures de transport sont pensées et quels sont leurs effets sur la ville.

(le métro et Sigmund Freud … bien bien bien … 6,5)

Eugène Onéguine

Livret de Constantin Chilovski et Pierre Tchaïkovski et sur une musique du dernier.
Production de l’Opéra de Francfort-sur-le-Main.

Les portes du pénitencier vont bientôt se refermer.

Eugène Onéguine, c’est le héros qui n’est non pas châtié par l’Amour mais par la société. Son châtiment, le héros l’a cherché, par sa superbe, par sa bêtise, par ennui. Il est même doublement sanctionné et s’il croît qu’il est une rédemption possible, jamais elle ne peut se matérialiser, ne serait-ce qu’un instant.

L’action débute dans le jardin de la famille Larine, où se trouve Madame Larine, ses deux filles Tatiana et Olga (dont on cherche à montrer les dissemblances de caractère à travers leurs chants) et la vielle gouvernante Niania. Des paysans viennent et chantent, puis arrivent deux visiteurs : Lenski, le voisin et fiancé d’Olga, accompagné de Onéguine, un ami. Tatiana est séduite par Onéguine.

Le soir venu, Tatiana avoue son amour naissant à la gouvernante, puis écrit une lettre. Le matin venu, Tatiana supplie la gouvernante de faire parvenir sa lettre à Onéguine. Ce dernier revient alors pour donner sa réponse à la lettre. C’est la douche froide pour Tatiana.

Un bal est donné en l’honneur de Tatiana. Onéguine est irrité par les racontars des villageois et regrette d’être venu. Il le reproche à Lenski. Pour se venger, il danse avec Olga. Lenski en prend ombrage et la dispute dégénère, malgré l’intermède d’un Français faisant l’éloge de Tatiana, en une convocation en duel le lendemain matin. Avant le duel, Lenski dit son inquétude et son amour d’Olga. Arrive Onéguine et el débat reprend. Se refusant à mettre fin à leur différent, les deux s’affrontent et Lenski meurt.

De nombreuses années plus tard, Onéguine revient à Saint-Pétersbourg d’un très long voyage à l’étranger. Il rencontre son ami le prince Grémine dans un bal, qui lui dit son amour pour sa femme, Tatiana Larine. Grémine lui présente Tatiana, et les deux se reconnaissent. Onéguine veut lui dire son amour. Lors d’un entretien, Onéguine dit son amour à Tatiana. Celle-ci lui rappelle combien ils étaient proches du bonheur quand ils étaient à la campagne. Elle lui dit même qu’elle l’aime encore mais lui demande de partir, car elle est mariée. Onéguine est laissé seul à ses regrets et sa douleur.

L’œuvre est placée dans une ambiance soviétique des années 80, avec costumes correspondants (Onéguine est très new-wave, robes à fleur pour Olga et Tatiana, mais Lenski est un poète hipster). Sur le plateau alternent deux décors (dans les deux premiers actes), une sorte de bar comme dans le Palais de la République à Berlin-Est (avec ses mosaïques de cosmonautes et de scientifiques) et une boulangerie industrielle (qui ne prend pas constamment la place de l’extérieur). Dans le troisième acte, c’est un long banc qui serpente sur le plateau et qui tourne sur lui-même. En avant du plateau se trouvent des glissières où peuvent se mouvoir des grilles (dorées ?) comme celles d’un grand magasin et au-dessus sont écrits, en lettre lumineuses et pouvant varier d’intensité, trois mots en russe (dont nous cherchons encore la signification, surtout que certaines lettres sont à un moment éteintes, donnant peut-être ainsi naissance à d’autres mots).

La production a donné à entendre une palette de voix d’une grande homogénéité, ingrédients d’un spectacle de très bonne tenue. Tatiana a été à juste titre très appréciée. Cette dernière a par contre été très couverte par l’orchestre dans son air dit de la lettre, un orchestre où tout n’a pas été parfait (un cor qui dérape …). Le rideau de fer (tiens donc …) était une bonne idée dans ce qu’il symbolisait une cage dorée. Sa fermeture dans la scène finale ne matérialise pas que l’impossibilité pour Onéguine d’accéder à Tatiana mais aussi la fin de la période romantique qui s’était commencé avec l’ouverture du rideau dans le premier acte. La société, celle des mariages arrangés, revient percuter Onéguine quand Tatiana lui dit qu’elle est mariée (la gouvernante parle de son mariage arrangé à Tatiana, où elle apprit, ensuite, à aimer son mari). Moins heureux furent l’utilisation de tous les préjugés disponibles sur la Russie lors de la scène du bal (danseurs folkloriques avec pain et sel, alcoolisme, pope et soldats …) et l’utilisation des lettres lumineuses non accessibles aux russophones.

Il en ressort un opéra de très bonne facture mais qui ne devrait pas marquer l’histoire non plus.

(des boulangers en rangs qui malaxent des pains en rythme tout en chantant des chants paysans … 7)

Solomon Kane, l’intégrale

Recueil de nouvelles de Robert E. Howard, introduit et commenté par Patrick Louinet.

Un corbeau s’est posé.

Beaucoup moins connu que Conan, Solomon Kane est un héros de R. Howard qui a aussi bénéficié d’une adaptation cinématographique (en 2009). Il est présent dans beaucoup moins d’aventures que le Cimmérien mais n’est néanmoins pas un personnage mineur de l’œuvre howardienne. D’une certaine manière, c’est un personnage plus complexe que Conan. Est-il vraiment puritain ? Se sait-il fou ?

Solomon Kane se donne seul des missions vengeresses qui peuvent durer des années et qu’il pense divines. C’est ainsi que dès la première nouvelle du récit (une fois passée la courte introduction de P. Louinet), le héros tombe sur une jeune mourante qu’il ne connaît ni d’Eve ni d’Adam et le voilà parti à la poursuite des coupables.  Cette poursuite le mène loin dans un XVIe siècle dérangé et le met en contact avec des phénomènes assez peu bibliques … La seconde nouvelle quitte cependant provisoirement l’exotisme pour venir en Angleterre. L’intrigue, assez téléphonée, tourne autour d’une lande décharnée hantée par quelque chose qui tue et dépèce les voyageurs.  La troisième nouvelle reste dans ce registre « anglais » mais conte une histoire où S. Kane est le spectateur de la revanche d’un nécromancien dénoncé par son ami. S. Kane est également plutôt spectateur dans la suivante, Bruits d’ossements. En Forêt Noire, Kane et un compagnon de voyage s’arrêtent dans une auberge qui ne semble pas être des plus animées …

La cinquième nouvelle revient dans l’ambiance de la toute première (les nouvelles sont présentées dans ce livre dans leur ordre de publication). On retrouve N’Longa et notre aventurier puritain poursuit ses explorations. Il est des collines aux cavernes peu accueillantes dans la région que traverse S. Kane mais le bâton de N’Longa a quelques capacités insoupçonnées ! La nouvelle suivante conduit S. Kane à entrer en contact avec une reine héritière d’une civilisation oubliée. Comme le genre de la donzelle n’est pas exactement celui du héros (on flirte par moments avec le SM lesbien, p. 151, après des passages qui étaient déjà marqués par un exotisme sensuel), les choses se passent assez mal.

La suite des nouvelles est ensuite interrompue par un poème où Salomon Kane entre en conflit avec Francis Drake. Elle reprend avec une aventure où Kane est opposé à des pirates tourmentant un jeune couple (La flamme bleue de la vengeance). Le héros y fait lui-même le parallèle entre sa personne et la nuit, et avoue que c’est souvent la vengeance qui le guide (p. 236). Un second poème sans titre fait la transition avec ce qui est à notre sens parmi les meilleures nouvelles du recueil : Les ailes dans la nuit. Cela fourmille de scènes frappantes. La nouvelle qui lui fait suite cherche quant à elle du côté de l’horreur cosmique (p. 310) et on en apprend un peu plus sur le bâton que N’Longa a donné à Solomon.

Un dernier poème, ayant pour sujet le retour à la maison de Solomon Kane précède les appendices.  Ces derniers comprennent trois fragments de nouvelles, dans leurs versions de travail non corrigées, la première version de Bruits d’ossements (avec des différences significatives, p. 420) et deux fragments sans titres (dont le dernier refait une incursion du côté des civilisations oubliées) puis une aventure appelée les Epées de la Fraternité qui est une autre version de La flamme bleue de la vengeance mais où le héros se nomme Malachi Grim. Enfin, la partie des appendices est close par une autre version du dernier poème publié.

Le volume est complété par une analyse de P. Louinet, qui, au vu de sa qualité, aurait méritée d’être plus longue et une liste des sources utilisées pour bâtir ce recueil de 430 pages richement illustré.

Ce qui frappe dans les aventures de Solomon Kane (un mix assumé entre le roi Salomon et Caïn, le roi  sage et juste et le premier meurtrier de l’humanité, condamné à errer), c’est leur penchant envers l’œuvre de E. Rice Burrough et Tarzan (sans pourtant oublier R. Stevenson pour les pirates). Le héros est toujours habillé à l’européenne mais la jungle et les civilisations isolées ont une très grande importance dans les récits. R. Howard ne recherche pas le réalisme tout en voulant donner au lecteur des explications rationnelles. Il semble s’être finalement assez peu documenté et reste dans la perception étatsunienne de l’Afrique du début du XXe siècle (il se trompe aussi sur Karlsruhe, fondée seulement en  1715, p. 90). Les nouvelles ne sont pas toutes transcendantes mais il y a de très bonnes histoires et même des fulgurances qui surprennent le lecteur (la chute de la tour p. 182, p. 288 avec le crâne de Goru par exemple et le bâtiment en feu).

Comme chez Conan, R. Howard reste un homme de son temps, ce sur quoi P. Louinet insiste fortement dans son analyse (racisme, défiance envers le fascisme). Ce dernier n’est d’ailleurs pas aveuglé ni par S. Kane ni par R. Howard et décrit avec beaucoup de justesse les différentes évolutions de l’écrivain texien. L’utilisation de l’Afrique comme une image des profondeurs de l’inconscient est une idée de P. Louinet qui est à signaler, tout comme le tournant plus sexuel que prennent les écrits de R. Howard (ici le double Nakari-Lilith/Maryline) à partir de la fin 1928 (p. 423-424).

Une belle découverte en définitive. R. Howard a créé avec S. Kane, persuadé d’être l’instrument du courroux de Dieu (p. 186), un autre héros critique de la civilisation. Forme et fond du livre sont en parfaite adéquation, avec à nouveau un très bon travail de P. Louinet.

(« Il a été de mon devoir par le passé de devoir soulager de leur vie nombres d’hommes habités par le mal … », p. 210 … 8)