Pisa etrusca

Anatomia di une città scomparsa
Essai d’étruscologie de Stefano Bruni.

Cachée, plus cachée.

Pise, une ville antique sans antiquités. p. 7

Pise, c’est l’oubliée de l’étruscologie. Très rarement sur les cartes, ou alors remplacée par la colonie romaine de Luni, et absente des grands manuels de la discipline. Il est vrai que la cité étrusque la plus au nord sur la côte tyrrhénienne cumule les handicaps : comme souvent en Toscane une occupation urbaine continue jusqu’à nos jours, pas de tombes peintes comme à Tarquinia, pas de nécropole romantique comme à Cerveteri ou de murailles pittoresques comme à Rosselle. Les découvertes archéologiques des siècles passés n’ont pas non plus mis au jour de trésors et à peine quelques découvertes fortuites ont été faites avant le XXe siècle. Seule la mise en place d’une administration patrimoniale et la conduite de fouilles de sauvetage permirent de petit à petit se faire une idée de la ville située aujourd’hui bien plus loin de la mer qu’au Ve siècle avant notre ère, à la confluence de l’Arno et de l’Auser (aujourd’hui appelé Serchio, au cours détourné à partir du VIe siècle ap. J.-C. et ne se jetant plus dans l’Arno). Et c’est seulement avec ces découvertes que l’on passe d’une Pise vue comme ligure à une Pise étrusque.

Et c’est aussi l’objet de la première partie du présent livre, écrit par Stefano Bruni en 1998 alors qu’il est encore archéologue auprès de la Surintendance archéologique à Pise et en charge des fouilles urbaines. La seconde partie avance quelques pistes pour la reconstruction du paysage antique de la bouche de l’Arno, avec quelques intéressantes remarques sur ce qu’est un « paysage troyen » (p. 53), qualificatif que semble donner quelques sources grecques à la ville. La transition se fait naturellement avec l’étude des différents mythes de fondation, qu’il soit troyen, grec (en lien avec la Pise d’Elide, près d’Olympie), étrusque (Tarchon y est le fondateur, comme à Tarquinia) ou encore, de manière assez étrange, hyperboréenne ou sicule (p. 65).

La troisième partie a pour but de poser les bases de l’occupation de la région pisane à l’Age du Bronze et à l’Age du Fer. Si les premières hauteurs entre Pise et Lucques sont occupées dès le Paléolithique, c’est aussi le cas des dunes entre Pise et Livourne. L’emplacement de la ville actuelle reçoit un premier peuplement à l’époque du Bronze et l’Age du Fer voit vraisemblablement l’émergence de familles aristocratiques et les premières nécropoles. S. Bruni passe ensuite à la période archaïque et passe en revue la ville (enfin ce que l’on peut en voir, c’est-à-dire pas tant de choses que cela), les nécropoles, le port de San Piero a Grado et l’organisation territoriale. L’auteur fait aussi part de ses espoirs quant aux découvertes futures qui permettraient peut-être d’en savoir plus. S. Bruni enchaîne sur la période classique (aux vestiges retrouvés moindres, surtout à cause des fondations des maisons-tours de la période médiévale qui vont venir détruire ces niveaux, p. 209) avant de passer à la période romaine. Cette dernière partie évoque le renouveau monumental de la ville, la question des murailles de la ville (passage très intéressant sur pourquoi ce n’est pas forcément une nécessité p. 231), les effets de l’alliance avec Rome et les rapports conflictuels avec les Ligures, quelques mots sur la production artisanale locale et enfin, pour finir, l’intégration de Pise dans le système romain qui se fait au Ier siècle av. J.-C. Le livre s’achève sur une bibliographie conséquente, une liste des sources antiques et divers index. Il n’y a pas vraiment de notes (des références dans le texte) et les renvois se font dans la bibliographie. Un système pour le moins … moyen. Le cahier central d’illustrations est impraticable.

Avec cet ouvrage, on sent de manière brute que le manque de sources ne permet pas toutes les audaces. Le seul passage où l’auteur se laisse aller à quelques conjectures est même très clairement indiqué avec l’emploi du mot fantaisie (p. 191). C’est donc sérieux du début à la fin, avec un auteur au plus près des sources archéologiques mais qui fait plus que se défendre avec les textes. On aurait par contre quelques sérieuses remontrances à faire aux cartes, trop sommaires. Celle des p. 46-47 est à la fois trop détaillée (toutes les rues de la ville actuelle) et incomplète pour permettre une compréhension. On cherche même dans ce cas le lien avec le texte.

Mais ce livre, avec ses tous petits défauts et un italien pas toujours facile, parvient néanmoins à faire renaître devant le lecteur une ville très particulière au sein de la confédération étrusque. Une ville entourée d’eau (Ravenne, Spina, Venise), à l’origine toponymique inconnue, aux pratiques funéraires toutes en retenue (difficile même de savoir si le défunt est un guerrier p. 143, des lois somptuaires ?) alors que la ville affiche sa richesse, bien insérée dans les réseaux de la côte, mais aussi vers Bologne et la Sicile et plus loin, le monde ionique (p. 138). Productrice de cippes (leur emploi incroyable autour du tumulus de la via San Jacopo p. 150-151, déjà évoqué ici), construisant au besoin des cénotaphes, Pise use aussi de cratères pour recueillir les cendres de ses défunts, parfois en marbre. Et le marbre est bien plus travaillé que dans les autres cités tyrrhéniennes, avec une stylistique en lien avec Marseille et l’Ionie (p. 167). Cité tournée vers la mer, elle fonde des colonies (Gênes) et entretien des comptoirs jusqu’en Espagne (Lattes, p. 194). Il y a un caractère pisan indéniable pour l’auteur, très différent de celui de sa voisine Volterra, et que sans vraiment le définir, ce dernier donne au lecteur d’admirer.

(de temps en temps, une petite submersion … 6,5)

Die etruskische Religion

Sakrale Stätten, Götter, Kulte, Rituale
Essai d’histoire de la religion étrusque par Ambros Joseph Pfiffig.

Les livres aussi vieillissent.

Dans le haut de la liste de ces livres que l’on se promettait enfin de lire (les classiques, les reconnus, ceux que l’on a promis de lire), figurait le présent livre en excellente place. Et juste à côté de lui, par ailleurs, son jumeau terrifiant Die Etruskische Sprache par le même auteur … Mais à un moment il passe de l’autre côté du parapet et fait partie de la catégorie des « lus ». Et ce ne fut pas sans combat …

La lecture n’en est pas aisée parce que c’est lourdement écrit et qu’en plus de s’adresser à des amateurs du domaine, il faut à ces derniers de très solides bases en philologie. C’était à prévoir de la part du grand spécialiste de la Momie de Zagreb (le plus long texte étrusque connu) et des Tables Eugubines (les sept tablettes de bronze décrivant divers rituels et rédigées en langue ombrienne), moine prémontré qui a enseigné à Vienne et Pérouse. Il a malheureusement été plus question après sa mort en 1998 de son intérêt trop marqué pour les jeunes garçons en divers lieux qui lui a valu une interdiction d’enseigner par l’Eglise et de la prison (en 1958 déjà).

L’ouvrage s’organise en quatre grandes parties. La première partie pose le cadre général de l’Etrurie antique avec sa géographie, son peuplement (et il est encore en 1975 question du thème obligatoire de l’origine), son organisation politique et son histoire. On peut à cette occasion faire quelques remarques sur les choix de l’auteur. Déjà, le lien entre culture étrusque et culture de Villanova n’a pas cours chez l’auteur et donc les éventuelles manifestations religieuses de cette culture qui apparait à la fin du second millénaire avant notre ère ne sont pas traitées. De manière générale, la chronologie est datée (p. 2-4). Ensuite, le tableau géographique de l’Etrurie semble très déconnecté de l’archéologie (absence de Pise) et la carte est anachronique (voire problématique, p. 3).

La seconde traite de la religion étrusque dans ses principales caractéristiques au travers de différents thèmes. Il y a en premier lieu les sources de nos connaissances, entre des documents dont la datation s’étale sur plusieurs siècles et l’étude d’une religion sans dogme fixé par écrit (comme toutes les religions antiques). Puis l’auteur passe à l’organisation du panthéon étrusque (qui use des foudres, les dieux voilés, absence de triade divine en Etrurie à la différence de la triade capitoline romaine p. 34) avant de détailler ce que les Romains appellent la « discipline étrusque » (les livres rituels révélés). A. Pfiffig poursuit ensuite son étude avec différentes sacralités. Tout d’abord celle de personnes (prêtres), puis de lieux (sanctuaires), de temps (très bon passage p. 92-93) et pour finir, des objets (le lituus).

Dans cette même partie, A. Pfiffig va plus dans le détail sur certains thèmes : rituels et sacrifices dans la Momie de Zagreb, espace sacré (templum), l’haruspicine, la brontoscopie, les prodiges (le monstre est un avertissement p. 139), la divination augurale (interprétation du vol des oiseaux), les oracles, la fin prévue de la civilisation étrusque (par elle-même), la mort et l’au-delà (bon passage sur l’Ile des Morts p. 168-172), l’éthique et la relation entre sexe et religion (l’auteur réfute l’existence d’un culte à Hermaphrodite p. 228 à base d’arguments grecs …). Ce qu’il en ressort, c’est avant tout un ton peu prudent, jusqu’au péremptoire (l’auteur bâtit une théorie sur un nom dont on a aucune occurrence, comme *λαυχυμνα p. 46). Et comme l’auteur, par formation, est très proche du texte, on finit par plus en savoir sur les Romains de la fin de la République et du Principat que sur ce que pensait les Etrusques, et l’ajout de références étymologiques crétoises ou mycéniennes n’apporte pas grand-chose (p. 77), si ce n’est vouloir ainsi apporter de l’eau au moulin de l’auteur dans sa vision des éléments féminins du panthéon comme héritiers d’une Grande Mère « mégalithique » (p. 77, surtout Menrva/Minerve et Turan/Vénus, mais aussi p. 216 sur l’origine pré-indoeuropéenne de la place de la femme). L’utilisation par les Etrusques d’un calendrier corinthien (lié au Corinthien Démarate venu en Etrurie etc.) est une idée assez baroque, puisqu’elle signifie qu’ils ne seraient pas assez dégourdis pour avoir le leur (p. 92) … La remarque sur le changement onomastique chez les femmes qu’induit l’octroi de la citoyenneté romaine en zone étrusque est par contre d’une grande justesse, en plus d’être rarement écrit ailleurs (p. 215, sur l’abandon du prénom féminin, cas unique au niveau méditerranéen, pour le gentilice féminisé et anonymisant avec la romanisation).

Et dans cette partie encore, l’archéologie peut avoir entre temps infirmé certaines vues (Murlo est encore un sanctuaire dans ce livre, alors qu’il est aujourd’hui sûr que le site est une résidence aristocratique p. 34, ou encore les Elogia Tarquiniensa p. 42, objet d’une analyse magistrale l’année même de la sortie de ce livre). Sur le Fanum Voltumnae, l’auteur reste (à raison selon nous) plus prudent en rappelant avec beaucoup d’arguments et de justesse le flou des sources quant à sa localisation (p. 69-71). L’absence dans ce livre de la mention de lacs sacrés, comme celui du Mont Falterona, est bien plus embarrassante.

La troisième partie décrit les différentes divinités étrusques connues, en commençant par les divinités célestes. Suivent les divinités guérisseuses, accompagnatrices (lases et génies comme Achvizr, peut-être la Libido divinisée), les divinités et démons aquatiques, les dieux liés à la Nature et à la naissance, à la guerre, à la Terre et à l’au-delà. Le panthéon est complété par des demi-dieux et des héros. Cette partie se conclut sur les épithètes et la religiosité personnelle. Les sources iconographiques (typiquement les miroirs) sont ici sous-employées, à l’inverse de ce que N. Thomson De Grummond a pu faire (voire ici mais avec des notices beaucoup plus courtes, avec notamment une autre analyse du dieu Mariš, qui est le fils de Menrva et Hercle, c’est-à-dire d’Hercule et Athéna !). Malgré cette importante limite (et peut-être des contradictions, comme avec Aplu p. 251), l’analyse est très complète avec de très nombreuses et intéressantes réflexions, en avertissement contre tout jugement hâtif sur l’incompréhension des Etrusques de la mythologie grecque (p. 288) et en avançant l’idée d’un étiquetage avec des labels grécisants de réalités purement étrusques : Calu et Thanr seraient alors « relookés » (à une période imprécise) en Aita et Phersipnei, Hadès et Perséphone, mais toujours avec une symbolique locale. Le lien cultuel fort probable entre Fufluns (Dionysos) et Cath (divinité solaire) est lui aussi du plus grand intérêt (p. 293).

La dernière et quatrième partie traite quelques questions annexes, de manière assez rapide. A. Pfiffig évoque l’éventuelle présence du chamanisme, du fétichisme (au sens vaudou), du bétylisme (pierres sacrées) et de l’influence grecque dans la religion étrusque (orphisme et pythagorisme). Le livre s’achève sur les possibles persistances des croyances étrusques après le Ve siècle de notre ère (p. 383-389), comme par exemple dans les croyances populaires toscanes. Sur ce dernier point, nous restons dubitatifs et ne pouvons exclure que l’étude ethnographiques qui est à l’origine de tout cela (faite par Ch. Leland, parue en 1892) soit une belle arnaque. Pour compléter le volume, une table récapitulative des divinités et des illustrations, la bibliographie, et un index.

Un livre massif, fondamental sur le sujet (sans être de loin le seul), mais qui a du mal à retenir le lecteur, même réceptif. Au niveau de la philologie, il est difficilement surpassable mais il semble qu’il se soit beaucoup limité à ce plan et que l’iconographie ne vient qu’en appoint (l’iconotypologie des foudres est même inutile, p. 131-133). Nous craignons que ce soit l’inverse de la répartition numérique dans le corpus des sources. Peut-être trop éthéré, pas assez proche du croyant, voir purement spéculatif par endroits, mais sûrement pas sans qualités.

(le indogermanisch, ca a bien vieilli …6)

Archaeology of Sanctuaries and Ritual in Etruria

Actes d’un colloque d’étruscologie tenu en 2008 à Chicago dirigés par Nancy Thomson de Grummond et Ingrid Edlund-Berry.

De suite, cela a l’air un brin sec …

L’intérêt pour les sanctuaires étrusques, présent presque depuis les débuts de la discipline mais limité en nombre (le Lac des Idoles, sur le Mont Falterona dans les Apennins, est fouillé dès 1838) s’est doublé d’un intérêt bien plus récent pour les rituels (la religion vécue) qui pouvaient y prendre place. Il y a à la fois la volonté de dépasser le classique « on ne sait pas ce que c’est, mais c’est sûrement rituel », mais aussi la prise de conscience de plus en plus répandue dans les cercles de spécialistes que les Etrusques ne sont pas le réceptacle passif (ou malcomprenant) de la pensée et des pratiques grecques ou orientales. Il y a sans doute sortie de la vision péjorative des Etrusques qu’avait Winckelmann. Enfin, il y a la couche ethnologique, très présente en Amérique du Nord dans l’archéologie, qui s’ajoute à ces facteurs. Mais surtout, l’évolution des techniques de fouilles permet aujourd’hui des analyses qui n’étaient pas possible avant, du fait de la non-reconnaissance des artefacts ou des installations.

Passée l’introduction, les quatre premiers articles s’attachent à mettre en lumière certains aspects de quatre sanctuaires distincts : le sanctuaire du Champ de Foire à Orvieto (Campo della Fiera), celui de l’Ara della Regina à Tarquinia, Poggio Colla (dans la vallée du Mugello) et enfin Cetamura in Chianti (pays siennois). L’article sur le sanctuaire du Champ de Foire se veut une sorte de rapport d’étape, démontrant l’utilisation de cette zone au pied de la ville de l’époque archaïque jusqu’à celle de Constantin, y compris après 264 avant J.-C. quand la population est censée avoir été déportée à Bolsena après la prise de la ville par les Romains. Mais l’article échoue aussi (comme jusqu’à présent tous ceux que nous avons pu lire sur ce site) à nous convaincre que ce sanctuaire, certes d’importance, est le sanctuaire fédéral des Etrusques, le Fanum Voltumnae tant recherché. Certes il est situé sur le territoire d’Orvieto comme le laisse penser Tite-Live (sans précision cependant), près d’un important nœud routier. Mais rien pour l’instant ne nous semble permettre une telle attribution (richesse des offrandes que devrait être celle d’un sanctuaire de tout premier plan, inscription, bâtiments, offrande ou représentation spécifique etc.), autre que l’envie de le trouver.

L’article sur le sanctuaire tarquinien est une présentation actualisée, avec une meilleure compréhension des phases successives du complexe. Cependant, la partie sur le « coffre » qui forme la base (désaxée) de l’autel devant le temple principal et qui serait lié au culte du fondateur Tarchon est très intéressante. Le chapitre sur le sanctuaire de Poggio Colla se concentre sur les pratiques rituelles sur le site (en usage du VIIe au IIe siècle avant notre ère), comme par exemple le placement à l’envers d’éléments architecturaux, dans une sorte de « défondation », ayant probablement eu lieu lors de la fin de l’usage du temple archaïque.

Le sanctuaire de Cetamura a, quant à lui, comme particularité d’être fréquenté par des artisans dont les ateliers sont à proximité (comme présenté de manière synthétique dans l’article). Les offrandes sont en rapport, avec l’accent mis sur des clous. L’auteur détaille onze traces de rituels, dont l’un dans le four d’un potier, tentant une classification selon la taxonomie des rituels de M. Bonghi Jovino (propitiation, fondation, célébration, destruction).

Les trois articles suivants sont plus synthétiques et thématiques. Le premier d’entre eux a pour thème les statues de culte, avec une approche très axée sur la méthode et insistant sur la difficulté de définir la fonction cultuelle des statues retrouvées, autrement qu’en voulant absolument calquer le modèle grec et en voulant ignorer un possible aniconisme généralisé. L’iconographie étrusque semble cependant être très attentive à la représentation de statues touchées ou des actes de désacralisations.  Suit un article sur les terres cuites votives à Véies et à Tarquinia, notant des différences qui auraient pour cause le sexe des visiteurs mais aussi des différences très marquées dans les types d’offrandes. Le dernier article, enfin, pose quelques jalons dans l’étude de l’utilisation du vin en contexte rituel (la multiplication des analyses de contenants va augmenter le corpus dans les années à venir), tout en posant comme acquis son utilisation en milieu funéraire (d’où aussi une certaine ambiguïté).

La conclusion est suivie d’une bibliographie générale sur les sanctuaires étrusques, qui est appelée elle aussi à prendre de l’importance dans les décennies à venir.

Ce livre frustre un peu par sa petitesse (et à son prix inversement proportionnel …). Mais peut-être le lecteur attendait-il l’actualisation de l’ouvrage synthétique de G. Colonna paru en 1985 (Santuari d’Etruria) … Ce n’est définitivement pas le cas mais cela reste une belle fenêtre ouverte sur le sujet, avec une grande variété d’exemples (géographiquement, temporellement, typologiquement), qui s’adresse seulement à des spécialistes.

(l’étude de la base inscrite dite de Kanuta à Orvieto c’est tout de même quelque chose … 7)

The Etruscans

9th-2nd centuries BC

Précis sur les armes et les armées étrusques par Raffaele d’Amato et Andrea Salimbeti.
Illustrations de Giuseppe Rava.

Rouge aussi est ma colère.

L’éditeur Osprey est très apprécié des figurinistes qui y trouvent pour monter leurs armées des renseignements sur le contexte et l’ordre de bataille de l’armée qu’ils ont choisi de peindre mais aussi des illustrations très bien documentées qui rendent crédibles leurs créations. Mais comme chaque tome est basé sur la même trame, il peut parfois manquer la plasticité nécessaire dans le cas d’armées ou de peuples dont on ne sait pas grand-chose, ou du moins pas assez pour en faire un livre court et abordable à tous les publics.

C’est le cas de celui-ci. Les seuls éléments surs étant matériels, ceux apportés par la recherche archéologique, il s’en suit un déséquilibre inévitable mais que les auteurs (certes avec de nombreuses cordes à leurs arcs mais pas spécialistes de la question) essayent de masquer de leur mieux. Tout découle du fait que la question cruciale des sources n’est jamais abordée, ce qui conduit à des affirmations péremptoires, allant jusqu’à la phantasmagorie.

Le livre est constitué de deux parties de manière chronologique : la première partie est dévolue à la période dite villanovienne (Xe-IXe siècle a.C.) et la seconde considère la période s’étalant du VIIIe au IIe siècle a. C. (appelée faussement ici classique). Une rapide mise au point contextuelle (mangée par le vieux débat de l’origine des Etrusques) et une chronologie très discutable ouvrent le volume.

Puis chaque partie est construite sur le même modèle. On commence par un petit point sur la sociologie, avant de s’intéresser à la composition et l’organisation des armées et aux tactiques employées. Une deuxième sous-partie détaille les armes et les équipements, distinguant les armes offensives des armes défensives, pour finir par les symboles de rang et l’habillement. La partie dite « classique » est la seule à bénéficier d’une section sur la musique.

Commençons par les points positifs. Les parties sur l’armement et particulièrement sur les armures en lin ou à lamelles sont du plus grand intérêt, appuyés sur de nombreuses illustrations (de manière générale, et comme toujours chez Osprey, le volume est richement illustré avec souvent de belles planches couleurs pleine page de reconstitutions). Le parallèle entre certaines lances villanoviennes en forme de flamme de bougies avec des points retrouvées à Olympie éveille la curiosité. De même les auteurs font sagement le choix de ne pas considérer les chars étrusques comme autre chose que des moyens de locomotion prestigieux (p. 28).

Mais du côté historique, organisationnel et tactique, c’est pas loin d’être catastrophique. Faute de donner au lecteur l’état de la documentation, on le balade. Virgile devient une source historique indiscutable (p. 28), les libri rituales, codification religieuse dont on a que des bribes, seraient censés parler de l’organisation militaire des cités (p. 31), on imagine des unités militaires spécialisées dans l’utilisation de haches doubles sans la moindre trace écrite (p. 42) … Dans les illustrations de G. Rava, les guerriers sont parfois dotés de peinture rouge sur le visage et les bras (p.8 pour l’explication), sans que là encore on puisse trouver une source. Certes, il y a le rouge sur les joues du triomphe romain, mais c’est tout de même très différent. Tout est résumé dans l’aveu de la p. 25 : on ne sait pas comment combattaient les Etrusques, donc ils combattaient sûrement comme des hoplites grecs … La question de la naissance du combat manipulaire reste débattue mais il n’est pas inconcevable que les Etrusques aient pu y participer. L’utilisation soutenue de termes techniques grecs n’aide pas non plus le lecteur à se distancier de ce modèle grec envahissant.

« Work in progress » nous dit-on p. 39 …

(la ville de Corneto ne s’appelle plus ainsi depuis 1922 … 4,5/5)

The Man Who Deciphered Linear B

The story of Michael Ventris.
Biographie du déchiffreur du Linéaire B par Andrew Robinson.

Ph’nglui mglw’nafh Cthulhu R’lyeh wgah’nagl fhtagn !

En 1900, à Knossos en Crète, l’archéologue Arthur Evans fouille un palais dit minoen. Au cours de ses travaux, il met au jour plusieurs tablettes d’argiles inscrites. Rapidement, il conclut à la présence de deux types distincts d’écritures, jusqu’alors inconnus : le Linéaire A et le Linéaire B. A. Evans ne peut rapprocher aucun langage connu de ses trouvailles et ne peut au cours des années qui suivent (il meurt en 1941) arriver à aucune conclusion étayée dans ce domaine, même si le Linéaire B semble être beaucoup plus prometteur que le A en termes de compréhension. A la différence des hiéroglyphes égyptiens, aucune inscription bilingue n’est découverte à Knossos, ni ailleurs, et ce jusqu’à nos jours. On ne sait même pas en 1900 quel est le type d’alphabet employé : consonantique, avec des voyelles, syllabique, logogrammique ? La clef, s’il en est une, ne peut être trouvée que de manière inductive, par recoupements entre les tablettes.

En 1936, l’état de l’art a peu évolué et différentes théories s’affrontent toujours. A. Evans, souhaitant être le premier à percer le secret des tablettes, n’a publié que six des textes mis au jour (p. 23). Le jeune Michael Ventris, 14 ans, fils d’un colonel britannique et d’une mère passionnée d’art, visite une exposition consacrée aux civilisations grecque et minoenne à son école. A. Evans est présent, présente une tablette et insiste sur ses vains efforts pour la lire. Le jeune Michael montre son intérêt, un intérêt qui le poursuivra toute sa vie. Quatre années plus tard, il publie son premier article sur la question dans la revue American Journal of Archaeology (p. 33). Malgré un don des langues (il en pratique une dizaine), M. Ventris ne se dirige pas vers la philologie mais se destine à l’architecture. Les années de guerre (il est officier navigateur dans la RAF) freinent son cursus mais il est diplômé en 1948. Nouant des contacts dans le monde universitaire (pas toujours fructueux ni satisfaisants pour quelqu’un d’extérieur à ce monde), ayant accès à plus de tablettes (celles de Pylos, découvertes en 1939), affinant sa méthode et testant des combinaisons, l’avancée décisive est faite en juin 1952. M. Ventris a alors la preuve que le linéaire B est bien une forme archaïque de grec, ce que lui-même réfutait comme tant d’autres dans les années 1940 (p. 98). Il aurait tant aimé que ce soit de l’étrusque … Suivent un livre, des articles, de nombreuses conférences, une gloire internationale mais aussi une lassitude (le mystère n’est-il pas résolu ?) et l’envie de enfin pouvoir être complètement architecte. Il décède dans un accident de voiture en 1956, à l’âge de 34 ans.

Ce livre se démarque par une grande érudition dans le domaine de la découverte des langues anciennes (il y a de nombreuses comparaisons avec le déchiffrement des hiéroglyphes égyptiens, des hiéroglyphes mayas ou du cunéiforme, comme à la p. 80 par exemple) et la proximité de l’auteur avec certains acteurs de cette aventure scientifique d’avant le temps de l’informatique. On peut lui reprocher son absence de notes mais l’auteur explique son choix en fin de volume (p. 160). Mais cela n’enlève pas une petite frustration … La variété des sources et leur nombre est néanmoins appréhendable à la lecture. C’est écrit dans un anglais très châtié, peut-être pour coller à l’époque et au niveau social de M. Ventris (sa mère possède des Picasso). La volonté de M. Ventris de faire coller le Linéaire B à l’étrusque est à notre sens expliqué de manière cohérente (se détacher d’un classicisme aryanisé dans les années 30 et 40, p.40, de manière plus émotionnelle que rationnelle) mais l’auteur peine à éclairer le lecteur dans la répartition entre logique et intuition dans la méthode employée pour le déchiffrement (p. 156 par exemple). Il est très souvent question du génie de M. Ventris mais l’explication nous semble toujours trop courte. La comparaison avec Champollion est toutefois intéressante (p. 12-13). Dans une conclusion générale, l’auteur démontre enfin que l’un des plus grands mérites de M. Ventris est d’avoir eu le courage et/ou la clairvoyance d’abandonner l’hypothèse qu’il chérissait depuis le début : le Linéaire B n’est pas de l’étrusque, c’est bel et bien du grec.

De nombreuses illustrations accompagnent le texte et chacun peut donc se faire une idée des difficultés mais aussi de voir certaines des étapes de l’avancement vers le déchiffrement. Des conseils de lecture et un index occupent la fin du volume.

(un dilettantisme assez appliqué tout de même …8)

The Archaeology of Etruscan Society

Essai d’étruscologie de Vedia Izzet.

Peau, pot et Pô.

Dans cet essai, Vedia Izzet (qui enseigne à Southampton) s’est donnée pour objectif de lier différents aspects de la culture matérielle étrusque par le concept de confins, d’interfaces (p. 31) et d’étudiers les changements qui ont lieu dans la culture étrusque à la fin du VIe siècle. Elle progresse ainsi du plus petit vers le plus grand, commençant avec les miroirs pour aboutir au grand large du commerce international dans l’espace méditerranéen.

Mais avant cela, V. Izzet pose son cadre méthodologique, et ceci de manière très approfondie dans le premier chapitre. Il est fait appel de manière très forte aux sciences sociales (sociologie du réseau, ethnologie). Cela a pour corollaire un hypercriticisme envers les sources écrites (puisqu’elles sont toujours écrites par des non-étrusques), qui concoure à conduire, selon l’auteur, l’étruscologie hors de l’archéologie classique (p. 10-15). C’est une vue qui se défend (et semble se retrouver de plus en plus, bien entendu chez les anglo-saxons, plus sensibles historiographiquement à la proximité avec l‘ethnologie), visant à ne plus voir les Etrusques comme coincés entre les Grecs et les Romains, la cinquième roue du carrosse et de simples transmetteurs idiots d’une culture grecque supposément supérieure. V. Izzet propose aussi de se défaire du biais funéraire et d’une vision trop marquée par l’histoire de l’art (forte critique du Corpus Speculorum Etruscorum p. 17). De manière générale, elle constate une absence de réflexion sur le pourquoi des évolutions (p. 19), trop souvent ramené à des influences étrangères (p. 20-21). Si l’on peut ne pas être en accord avec tous ces choix méthodologiques, c’est très solide de ce côté-là, non seulement dans ce premier chapitre mais aussi dans tous les suivants.

Le second chapitre initie la série d’études avec les miroirs, une grande spécialité étrusque. Ils sont considérés non seulement pour leurs revers historiés mais aussi pour leur qualité d’objet usuel (ce qui est, il faut en convenir avec l’auteur, moins fait), dialoguant avec celui, homme ou femme, qui le tient. L’étude dans ce chapitre se base sur le principe du corps modelé socialement (la peau sociale p. 49, avec son apprêt, les vêtements etc.), qui prend place dans un cadre de possibles sociaux. Du point de vue des sources, l’auteur rappelle qu’environs 4000 miroirs étrusques ont été retrouvés, dont seulement quatre dateraient d’avant la fin du VIe siècle et dont la moitié ne sont pas gravés. Mais si la conscience des corps et l’idée de beauté existe avant le Ve siècle, comment expliquer l’essor de la production à ce moment -là ? De plus, de nombreux miroirs comportent des scènes de parement, renvoyant au porteur dudit miroir. L’auteur, évidemment, cherche ses arguments dans les études de genre mais ses comparaisons risquent beaucoup l’anachronisme. De même, certaines analyses n’arrivent pas à convaincre (l’objectivation de deux danseuses p. 69 par exemple ou sur le sens de la nudité et de l’habillage, à la même page ou les exagérations des p. 71-73). Il arrive même que l’auteur puisse se contredire, parlant de choix de genre d’abord mais n’évoquant que la passivité féminine. Une comparaison entre ce que V. Izzet dit de la femme étrusque et la place de l’épouse du suzerain dans l’amour courtois aurait été intéressant … Par contre elle explique lumineusement la mécanique du parement, fait de soustractions chez l’homme (nudité) et d’addition chez la femme (p. 81). Il faut donc, pour l’auteur, bien prendre en compte les deux surfaces du miroir et leurs interactions.

Le troisième chapitre poursuit son parcours scalaire en passant à l’architecture funéraire. Le mouvement qui a lieu voit la disparition des grandes tombes à tumulus (il y a une critique des termes latins et grecs employés pour les descriptions) pour laisser la place à des tombes plus standardisées (comme à Orvieto). V. Izzet détaille d’abord les entrées des tombes (en théorie l’auteur ne veut étudier que Cerveteri, mais les exemples sont situés dans toute l’Etrurie), puis les différents types de structures avant de passer aux décorations (sculptées ou peintes). Les tombes entièrement peintes représentent à peine 2% de l’ensemble (p. 111). L’organisation des nécropoles évolue elle-aussi, avec une place laissée libre à la possibilité de rassemblement, comme une place urbaine, accompagnée d’une plus grande rationalisation de l’espace et une fin de l’orientation générale vers le nord-est des tombes (p. 118-119). Petite nouveauté, il a été prouvé la présence de tentes devant les tombes, vraisemblablement lors des funérailles (p. 112-113). L’auteur pense que c’est lié aux peintures à l’intérieur, mais il faut avouer que ce n’est pas entièrement convaincant.

Le chapitre suivant reste à la croisée des mondes puisqu’il prend en considération les sanctuaires. Il y a une très claire monumentalisation des sanctuaires à la fin du VIe siècle (p. 128), sans pour autant un abandon de sanctuaires plus anciens sans structures pérennes (comme le Lac des Idoles par exemple). V. Izzet détaille la forme que prend ce nouveau type de sanctuaire en se penchant sur le temple sous toutes ses facettes. Le maître mot, assez contestable, est que tout y a une signification (p. 122), mais lier la décoration à on emplacement sur le bâtiment n’est de loin pas sans intérêt.

Tant que l’on est dans l’architecture, restons-y avec l’architecture domestique (cinquième chapitre). L’objet de l’étude est ici le passage des huttes avec leurs murs courbes aux maisons intégrées dans les insulae, et donc aux murs droits et à des dimensions prédéfinies. La difficulté du corpus documentaires se niche ici dans le fait que de très nombreuses villes étrusques, et bien évidemment parmi les plus importantes, sont aussi le site de villes médiévales, modernes et contemporaines. L’étude s’en trouve fortement limitée. Ce chapitre est hélas miné par une contradiction (p. 147) : l’étude se veut non-chronologique mais elle l’est tout de même. Si l’on ajoute à cela la désagréable impression que certains auteurs cités semblent découvrir l’eau tiède (toujours p. 147), qu’il est questions de facteurs socio-culturels du changement qui ne sont jamais précisés (p. 152) et que le concept de non-maison est des plus flou (p. 151) et ne porte pas bien loin, cela fait de ce chapitre l’un des moins bon du livre.

Le chapitre suivant élargit encore le champ pour se placer au niveau des cités. Il est question de territoires, délimité par des forts ou des sanctuaires mais l’auteur développe aussi un point de vue non rituel des via cave (p. 193) et s’attarde sur des questions très britanniques de paysage avec les modifications causées par les canalisations (jusqu’à 600m de long à Véies au VIe siècle, p. 196) ou les routes (p. 195). Les constituants de la ville ne sont pas pour autant oubliés tout comme l’interface entre ville te campagne (p. 189). La vision d’une antiquité italienne non romaine très rurale en est assez chamboulée : dans la vallée de l’Albegna au VIe siècle, on compte 70% d’urbains (p. 206).

Le septième et dernier chapitre est peut-être le meilleur du volume. Comme couronnement, il donne au lecteur un aperçu des échanges méditerranéens (où la Grèce n’est pas le centre de tout) et à la place de l’Etrurie dans ceux-ci. La Grèce donc, ou plutôt les différentes cités grecques, mais aussi l’Italie et ses composantes. La côte levantine est elle aussi brièvement abordée, après avoir fait un très utile rappel historiographique. La conclusion de ce chapitre sert de conclusion générale, résumant la pensée de l’auteur, avant de passer à bibliographie imposante (plus de 70 pages !) et un index.

Au bilan, ce livre, aux larges ambitions tout en n’étant pas un manuel peine à atteindre ses objectifs. Pour le lecteur, les causes des changements listés au VIe siècle restent floues. Certains thèmes sont bien traités, d’autres ont du mal à emballer le lecteur. Parmi les points les plus intéressants figure celui sur l’alphabétisation féminine, mais qu’il faut mettre en regard avec le taux moyen d’alphabétisation (si l’on suit L. Shipley, comme ici). Il manque souvent des datations (pour les illustrations par exemple) et V. Izzet abuse de références plus tardives pour prouver ses dires. On peut aussi regretter que Charun soit qualifié de divinité p. 90, alors que c’est clairement un démon.

Mais ce qui reste le plus handicapant, c’est le système de références et de notes dans le texte (dit système Cambridge) qui empêche une lecture fluide, et qui, quand manquent les numéros de page auxquelles est renvoyé le lecteur, limite la reproductibilité scientifique. Et comme la bibliographie le montre, V. Izzet n’est pas avare en références …

(particulier cette disparition des plaques architectoniques domestiques après le VIe siècle p. 163 …6,5)

Religious Architecture in Latium and Etruria c.900 – 500 B.C.

Essai d’archéologie centre-italienne de Charlotte Potts.

Même d’Orvieto on ne sait pas tout.

Le temple antique, tel que tout le monde le connaît avec ses colonnes, ses chapiteaux et son fronton, n’est pas sorti de terre avec la fondation des cités en Italie. Comme tous les autres types de bâtiments, les édifices cultuels évoluent au cours du temps, mais le temple italique, qu’il soit latial ou étrusque, semble apparaître très soudainement à la fin de l’époque archaïque, sans avertissement. Mais est-ce si différent en Grèce ?

L’objectif de C. Potts est d’explorer cette émergence au VIe siècle avant notre ère (la fin de l’époque archaïque) en Italie centrale et sur sa face tyrrhénienne. Après une chronologie, une liste des abréviations et deux cartes, l’introduction fait part au lecteur du cadre dans lequel l’auteur inscrit son étude, entre la volonté de bien différencier les éléments latins des éléments étrusques (et de ne plus confondre sous le vocable étrusque toutes les découvertes antérieures à la république romaine) et celle de faire bien comprendre au lecteur que la présence d’activités religieuses n’est pas si simple à détecter. Elle liste ensuite les éléments qu’il y aura à prendre en considération en Italie centrale : podiums, autels, dépôts votifs, inscriptions, exceptionnalité des artefacts, miniaturisation, reste végétaux ou fauniques, représentations figurées et lieux (p. 8).

Le premier chapitre décrit le passage des dépôts votifs aux bâtiments cultuels, appelées huttes sacrées. Ces dépôts votifs peuvent être dans des abris sous roches (mais que jusqu’au début du premier millénaire avant notre ère p. 13) des bois ou près de sources, lacs ou cours d’eau. Ces lieux propices aux rapports avec le divin ne semblent pas nécessiter d’abris dans un premier temps. Mais à partir du Xe siècle (avant notre ère, comme toutes les datations dans cet article), des structures liées à ces dépôts votifs commencent à apparaître. L’auteur détaille ce qu’il faut comprendre par huttes sacrées, commençant par leur présence chez les auteurs latins puis s’intéressant aux continuités topographiques, à leur lien avec les sépultures d’enfants ou la nature de leur lien avec les activités rituelles (en leur sein, non loin). Des découvertes archéologiques (principalement des urnes cinéraires) permettent d’envisager leur éventuelle décoration (p. 20-24). C. Potts renseigne évidemment le lecteur sur la localisation des huttes sacrées qui ont été retrouvées (très peu nombreuses) et ce que l’on peut en conclure, à savoir qu’il est très difficile de différencier une hutte sacrée d’une habitation et que donc il est difficile de présupposer une identité de fonction entre une hutte et un bâtiment cultuel postérieur sur le même emplacement. Une hutte retrouvée sous un temple n’est pas non plus forcément la plus grande du village, ni que les huttes sacrées potentielles fussent dans une position de centralité (p. 30).

La question de la continuité fonctionnelle étant réglée, C. Potts passe dans le chapitre suivant à l’architecture des premiers temples et sanctuaires. Après une rapide typologie, l’auteur brosse rapidement le tableau des théories les plus répandues sur le VIIe siècle centre-italique avant de plus développer sur les preuves d’une nouvelle manière architecturale de signifier la distinction. C. Potts distingue 25 exemples, dont le plus emblématique, et peut-être le plus ancien, est le temple dit de San Omobono sur le Forum Boarium à Rome (dédié à Mater Matuta). Les cas de la Regia (que seules les sources littéraires qualifient de ce nom p. 36) à Rome et le site de Poggio Civitate (exemple d’ambiguïté architecturale fin VIIe-début VIe, p. 37) sont aussi discutés. La question du podium en lui-même est discutée sous ses nombreux aspects (car il faut en premier lieu le distinguer de la terrasse par exemple, p. 42). Il y a une claire volonté, dans la construction d’un temple sur podium, de se démarquer de la pratique jusqu’alors en vigueur au VIe siècle et distinguer un bâtiment religieux de son environnement. Il y a donc monumentalisation (rareté, visibilité, durée, matériaux en grande quantité et qualité). De manière plus inattendue, la mode prend d’abord dans le Latium (mais sous influence étrusque ? les Tarquins pour faire mieux qu’à Tarquinia ? p. 45) avant que l’Etrurie ne participe ensuite au mouvement.

Et comme la monumentalisation est un phénomène qui nécessite l’emploi d’une couteuse décoration, C. Potts aborde ce sujet dans le quatrième chapitre. Première caractéristique de la décoration de ces bâtiments religieux d’un nouveau type, temple comme sanctuaire, le toit tuilé marque une différence flagrante avec les toits de joncs ou de chaumes de la période précédente. A ces tuiles sont ajoutées des décorations elles aussi en terre cuite (et qui le plus souvent protègent des intempéries des parties ligneuses). Mais ces décorations ne sont pas l’apanage exclusif des bâtiments religieux et des bâtiments civiques ou privés (il est question des Bachiades, liés aux Tarquins, p. 59) peuvent être dotés de ce type de décorations, surtout en Etrurie et ce jusque vers 510 (p. 57). De plus, et l’auteur nous le démontre à l’aide de son catalogue, l’usage de telles décoration est limitée en nombre et en motifs (liés à la production céramique). L’auteur avance plusieurs théories quant à cet usage parcimonieux (impératif religieux, choix politiques ou processus d’hellénisation, p. 59-61). A la fin VIe siècle, les décorations tectoriales sont considérés comme parfaitement adaptées à l’ornement de l’architecture religieuse, d’abord dans le Latium puis en Etrurie. Les thèmes reprennent ceux déjà en usage dans d’autres lieux.

Le cinquième chapitre s’écarte du temple en lui-même pour considérer son environnement immédiat avec les autels et les statues de culte. Il y a peu souvent un lien direct entre le temple et un ou des autels disposés alentour (dont la plupart sont retrouvés en contexte funéraire p. 67-68), et il peut arriver qu’il n’y ait pas de ligne de visibilité entre un autel et le temple (mais le sacrifice est-il seulement public ? semi-public ? ?) ou même qu’il soit en intérieur tout en utilisant du feu ou juste un puit destiné à des sacrifices liquides (p. 73). De plus, la monumentalisation des temples ne s’accompagne pas d’une monumentalisation des autels : certains sont de simples cercles de pierres encore au IVe siècle (p. 68). Ce que nous savons de la religion romaine de l’époque républicaine tardive ne semble pas pouvoir s’étendre aux pratiques archaïques, a fortiori en Etrurie. Il y a ainsi des disparités régionales et certains autels cachés aux regards peuvent avoir servi à la divination, surtout en Etrurie (p. 74).
Pour ce qui est des statues de culte, C. Potts souligne d’abord la difficulté qu’il y a à les identifier comme telles. Elle présente ensuite trois cas possibles (la Minerva Tritonia de Lavinium, la Vénus de Cannicella à Orvieto et la tête de Junon de Civita Castellana) avant de les discuter. Le grand problème reste qu’aucune base de statue n’a été retrouvée en Italie centrale à l’époque archaïque, pas plus que de niches (p. 79) alors pourtant que des acrotères représentants des héros ou des divinités sous forme anthropomorphiques sont communs à partir de la seconde moitié du VIe siècle. Ces statues de culte étaient-elles en bois (pour les Romains eux-mêmes il n’y a pas de statues avant le VIe p. 82) ? Est-on en présence d’aniconisme, très répandu en Méditerranée ? Ces questions font bien entendu partie du propos de l’auteur qui conclut à l’indépendance des trois éléments temple, autel et statue et à une absence de statues de culte dont aucune n’est mentionnée avant le Ve siècle. Conséquemment, le temple est un lieu de rituel mais pas forcément la maison d’un dieu. Le cas de San Omobono est cependant particulier ici, avec un lien clair entre le temple et l’autel.

Fort de cette conclusion, C. Potts postule donc dans le chapitre suivant que la monumentalisation n’a pas à voir avec l’environnement immédiats mais est à replacer dans une topographie plus large, à l’échelle de l’établissement qui accueille cette nouvelle forme. L’auteur compare donc les localisations de ces premiers temples archaïques dans le Latium (Rome, Satricum) et en Etrurie (Pyrgi, Véies et Vulci). Tous ces exemples montrent une volonté de se rendre accessible aux voyageurs et aux marchands, sans continuité fonctionnelle. L’époque archaïque inaugure une tradition (p. 88). Potts en profite pour critiquer le fait de classer les temples en urbain/extra-urbain/rural (p. 97-98).

Le dernier chapitre explore différents modèles d’explication de l’émergence de temples sur podium en Italie centrale (développement naturel, changements sociopolitiques et changement de fonction). Mais l’auteur met l’accent sur les contacts culturels et commerciaux en Méditerranée entre 750 et 500, mettant en rapport la monumentalisation des temples en Grèce continentale, en Asie mineure, à Naukratis en Egypte et en Grande Grèce. Pour C. Potts il faut voir dans la place des temples au sein des réseaux commerciaux une ritualisation des interactions et une ritualisation des échanges au même moment partout sur le pourtour méditerranéen (sans stimulus grec, p. 110), où le temple a pour but de mettre en confiance les marchands et les visiteurs en leur présentant un terrain favorable à la reconnaissance des ressemblances entre les divinités nationales (comme dans le cas d’Uni-Astre sur les tablettes d’or de Pyrgi). Des marchés sous protection divine en quelques sortes, où l’on peut se rassembler et interagir en paix, où la présence divine des huttes sacrées est mise au profit du commerce international (ce que la très courte conclusion rappelle).

L’appendice veut apporter une réponse aux lecteurs attentifs qui auront remarqué que le temple de Jupiter Optimus Maximus (construit à la fin du VIe siècle sur le Capitole) occupe une place congrue dans ce livre puis l’auteur présente son catalogue sur une vingtaine de pages avant de laisser la place à une bibliographie d’un très beau volume et un index. Le volume est complété par des planches d’illustration.

Si le livre est d’une grande densité et s’adresse à un public très averti, il se lit avec une très grande aisance. La critique y est toujours fine (remarquable p. 75-78 pour ce qui est des trois statues de culte) et très solidement documentée, avec des références qui sont à ce même niveau d’excellence. Il est de passages tout bonnement passionnant, comme celui sur les autels (sacrifices liquides, autels intérieurs) ou sur la topographie des sanctuaires et comment les visiteurs les approchent. Les tableaux permettent de très utiles comparaisons entre les sites et forment d’utiles résumés dans les chapitres. C’est de la très belle science et on l’aura compris, cet ouvrage est fondamental pour comprendre la naissance du temple italique sur podium, tout en donnant plein d’idées que l’on souhaiterait pouvoir creuser plus avant. Elle est peut-être juste un peu rapide pour dire que le Fanum Voltumnae peut maintenant être localisé.

C. Potts se positionne de manière originale avec un angle d’approche mettant à égalité Latium et Etrurie, ce qui permet de montrer certaines innovations latines, un peu moins dans l’ombre imposante de l’Etrurie et se détachant des Grecs comme agents civilisateurs ubiquitaires.

(Rome n’est pas forcément à cette période à la remorque de l’Etrurie et est même en avance sur le plan de la distinction humain/divin des bâtiments … 8,5)

Etruscan Myths, Sacred History, and Legend

Essai de mythographie étrusque de Nancy Thomson de Grummond.

Mnrva plutôt bien.

Chaque peuple, quel que soit l’époque, a ses mythes. R. Barthes l’a démontré, le mythe ne se limite pas à l’Antiquité. Mais notre connaissance des mythes et légendes grecs et romains s’appuient sur des textes, à partir desquels, historiquement, une analyse des différentes iconographies a été faite. Quasiment rien de cela chez les Etrusques, dont très peu de textes nous sont parvenus et où la majorité des informations relatives aux dieux, aux héros et à leurs histoires nous ont été passées à travers le prisme d’auteurs non-étrusques (même si certains peuvent avoir, comme Virgile, des liens familiaux ou des connaissances de première main).

Comment alors, avec toutes ces limites, déterminer de manière plausible ce que les Etrusques se racontaient au coin du feu ? Nancy de Grummond propose une voie proprement étrusque, dégagée de l’idée que les représentations mythologiques étrusques seraient des copies ratées (ou avec des « erreurs ») des représentations grecques. Pour cela elle propose tout d’abord au lecteur de se défaire des descriptions basées sur les noms grecs des personnages (on ne voit pas Aphrodite mais Turan). A l’appui de sa thèse, l’auteur démontre au lecteur qu’il n’y a pas de décalque mécanique, notamment parce qu’il y a, à côté de personnages clairement grecs, des personnages que l’on ne retrouve qu’en Etrurie. Et quand des dieux grecs sont représentés, et l’on ne peut pas se méprendre du fait que leur claire dénomination, leurs attributs et leurs actes peuvent varier du tout au tout. Comme de nombreuses représentations ont pour support des miroirs, N. de Grummond est, en tant que spécialiste de ce type d’objet, tout indiquée pour explorer en profondeur l’univers mental étrusque. Les représentations traitées dans ce livre sont distinctes de la pratique religieuse, mais elles ne sont bien évidemment pas sans lien avec cette dernière.

Prenant appui sur le foie en bronze de Plaisance et sur la description par Martianus Capelle du cosmos étrusque (Ve siècle ap. J.-C.), N. de Grummond détaille tous les dieux, héros et esprits dont nous avons des représentations assurées ou probable par ordre d’importance ou de domaine.  Mais avant cela, une introduction (qui forme le premier chapitre) donne au lecteur une idée de ce que furent les Etrusques, avec des aspects tant chronologiques que géographiques. On ne peut pas échapper à la question des origines, mais c’est un domaine que l’on quitte bien vite pour une progression chronologique, axée sur l’iconographie et l’arrivée dans l’art étrusques de représentation de dieux étrangers, mais pas forcément grecs. La question des sources (textes, miroirs, sarcophages, peintures murales, intailles et autres supports) est une partie fondamentale de cette introduction, suivie logiquement par une partie sur la méthodologie employée par l’auteur. Ce dernier précise ce qu’il faut entendre par influence grecque et fait le parallèle entre la méthode combinatoire interne utilisée en linguistique étrusque et les grilles d’analyse proposées dans ce livre. La question de l’usage des mythes et de la nature des dieux (souvent vague quant au nombre, au sexe, à l’apparence et aux attributs comme le dit M. Pallottino cité p. 21) complètent cette introduction d’une très grande tenue, alliant concision, précision et profondeur.

La première phrase du second chapitre sur les prophètes affirme que, comme le christianisme et le judaïsme, la religion étrusque est une religion révélée. Nous pensons que l’on peut apporter de très sérieux contre-arguments pour chacune des trois religions citées, mais l’auteur a raison dans le sens que pour ces trois religions, il existe des prophètes. Pour les Etrusques, Tagès est le plus important, puisque c’est celui qui enseigne la mantique et la signification des éclairs aux Etrusques et dont les paroles sont rassemblées dans des livres. D’autres prophètes sont connus en Etrurie, comme Cacu (représenté comme homme ou comme femme), Vecuvia, Chalchas, Orphée, Ulpan, Umaele (avec une tête dans un sac …). Il est de nombreuses « têtes prophétesses » sur les miroirs. De même, le chant semble être un élément fondamental de la prophétie.

Le chapitre suivant, plutôt court, précise les vues étrusques (enfin, ce que l’on peut en savoir …) quant à la création, au temps et à l’organisation de l’univers. N. de Grummond étudie de manière extensive et croisée le texte de Martianus Capelle et le foie de Plaisance, des documents fondamentaux pour les attributions qu’elle propose par la suite. Et à tout seigneur tout honneur, le quatrième chapitre est consacré à Tinia, correspondant à Zeus/Jupiter. Tinia peut user de trois types d’éclair et est le plus souvent représenté jeune et imberbe. Tinia est aussi en charge des bornes et des frontières et est connecté avec le monde inférieur (avec la fertilité qui lui est associée).

Souvent représentées avec Tinia, Uni, Menrva, Turan, Artumes sont avec Thesan, Cel Ati et Catha les désses abordés dans le chapitre suivant. Comme pour d’autres divinités, il arrive qu’Artumes/Artemis apparaisse sous une forme masculine (p. 102). L’analyse dans ce chapitre des antéfixes du temple de Pyrgi est particulièrement excitante (p. 109). Le chapitre s‘achève avec la statue de la déesse nue d’Orvieto.

N. de Grummond continue dans le sixième chapitre son tour d’horizon avec Fufluns, Turms (avec son double p. 125), Aplus, Usil et Śuri, Sethlans (un Héphaïstos en pleine forme et déjà représentés avant les premiers contacts avec les Grecs p. 135), Tiv (la lune sous forme masculine, alors que Usil le soleil est lui aussi masculin), Laran, Mariś et enfin Nethuns. L’importance rituelle du marteau et du clou est bien mise en relief dans le paragrqphe consacré à Sethlans, une particularité que l’on retrouve aussi à Rome.

A ces grands dieux sont parfois associés des divinités moindres. N. de Grummond ne les oublie pas. Il est donc question dans le chapitre septième de Culśanś (le latin Janus), Cilens, Selvans, Thuf, des esprits et des personnifications (la Santé, la Victoire etc.). Ces derniers participent à des scènes allégoriques.

Mais s’il est des dieux, il est aussi des héros et Hercle/Héraclès est particulièrement apprécié en Etrurie, tout comme les frères Vipinnas, les locaux de l’étape. Hercle n’échappe pas à l’étrucisation, en gagnant par exemple un autre frère jumeau dénommé Vile. Très apprécié dans le Latium, les Dioscures/Tinias Cliniar (mais aussi leur sœur Hélène) sont très présents dans l’iconographie. Persée, Pelé, Ulysse et Achille (qui survit à la prise de Troie selon un miroir) sont aussi présents. Un héro à l’araire clôt ce chapitre.

L’auteur revient ensuite vers les histoires de création en s’intéressant aux héros fondateurs Tyrrhennos, Tarchon et Mézence avant de passer au chapitre sur les Enfers. Ce chapitre rappelle les évolutions dans la conception étrusque de l’au-delà, met en lumière Aita et Persipnei, Vanth, Charun et quelques personnages mineurs.

Ce volume s’achève sur un court précis historiographique, retraçant l’histoire de l’étude des mythes étrusques. Les notes, une bibliographie, un index et un CD contenant des illustrations rangées par sujets, dont celles présentes en très grand nombre dans les chapitres du livre, font monter le nombre de pages à plus de 260 pages.

On peut ne pas toujours être d’accord avec les vues de N. Grummond (elle ne voit pas d’association Olta/Porsenna p. 14, voit sans discussion Macstarna comme un esclave p. 176, ne considère pas la possibilité qu’Usil manie des météores p. 8 ou parle de décapitation dans la tombe François alors que ce n’en est pas une p. 198), l’auteur est toujours d’une grande et très appréciable prudence dans ses interprétations (sauf peut-être avec la tombe Francois p. 178). Elle n’écrit pas d’encyclopédie (l’association de Śuri avec des sacrifices humains aux îles Lipari n’est pas mentionnée p. 133) mais cela reste un travail très impressionnant, donnant en plus un très bon aperçu des débats en cours, et pas uniquement dans la notice finale (p. 166 par exemple). Malgré le fait que le livre puisse ressembler à un catalogue, le style est très loin d’être sec. Il peut manquer ici ou là une note pour contenter le lecteur avisé, mais c’est plus que suffisant dans l’extrême majorité des cas. L’auteur fait plusieurs fois des parallèles avec la mythologie nordique, à raison sans qu’il faille y voir une vérité d’évangile (les Vanths rapprochées des Walkyries p. 224, en plus du lien supposé entre l’alphabet étrusque et l’alphabet runique).

De la lecture on ressort convaincu que la vision étrusque des mythes n’est pas une vision grecque bourrée d’erreurs, mais bien une vision locale (comme il en existe beaucoup en Grèce même par ailleurs), se basant à la fois sur des histoires locales (héros comme dieux) et des histoires grecques importées, digérées et parfois réinterprétées. La masse d’informations transmise par l’auteur est très importante mais elle arrive au lecteur de très belle manière, pour peu que celui-ci ait une connaissance minimale du monde antique.

(pour bien prophétiser, il faut savoir lever le pied gauche … 8,5)

The Etruscans

Ouvrage de vulgarisation scientifique de Lucy Shipley.

Toujours en très bonne compagnie.

Ce livre réussit un tour de force : il allie vulgarisation et actualité de la recherche. Paru en 2017, ce livre intègre des découvertes faites jusqu’au mitan des années 2010, sans pour autant perdre de vue qu’il s’adresse à un public néophyte (mais déjà intéressé par l’Antiquité, comme il semble décrit p. 49). La série à laquelle appartient ce livre s’est donnée pour objectif non seulement de décrire le parcours, l’émergence, l’efflorescence et la fin de grandes civilisations et de peuples de l’Antiquité, mais aussi de savoir ce qu’il nous en reste dans notre monde actuel. Et c’est que le bât peut amener à blesser …

L’introduction explicite tout d’abord ce qu’il faut entendre par civilisations perdues. Au XIXe siècle, les choses sont claires : des explorateurs ou des savants qui font le constat que les habitants d’un territoire ne sont pas dignes de leurs ancêtres, voire qu’ils n’ont rien en commun (p. 13). L’erreur inverse, c’est de considérer que ces personnes nous sont identiques. Et ces deux mythes nous ont été transmis, avec parfois une origine dès l’Antiquité. L. Shipley, une fois ces bases posées, peut passer à la question suivante : pourquoi les Etrusques nous importent ?

La réponse à cette question se trouve dans le premier chapitre, qui comme chaque chapitre de ce livre, est dominé par un artefact archéologique. Dans ce premier chapitre, c’est le Sarcophage des Epoux du Musée du Louvres. Il permet à l’auteur d’aborder les questions de l’archéologie, de la périodisation de l’archéologie étrusque (et les problèmes que cela emporte), les limites techniques (la datation au carbone 14 et sa marge d’erreur p. 22-23). Le lecteur peut à ce moment remarquer quelques traits assez britanniques dans le texte, entre un humour qui rend le propos encore plus plaisant et une attention très marquée pour le paysage, dans la lignée de J.B. Ward Perkins. Et le paysage qu’a connu le couple du sarcophage, dominé par la forêt, c’est ce qui permet à l’auteur de glisser vers la description du territoire étrusque et de parler des sources de la richesse étrusque : l’agriculture productrice de surplus et la métallurgie, elle aussi exportée à grandes distances.

Le second chapitre reste dans le domaine funéraire, se concentrant d’abord sur la crémation à partir d’une urne-cabane de Tarquinia. De cette cabane, la question de la maison et donc des origines découlent (et c’est amené d’une manière très différente des autres ouvrages du même genre). Les différentes théories sur l’origine des Etrusques, dont certaines étaient déjà débattues dans l’Antiquité, sont évoquées : l’origine anatolienne, l’origine alpine ou l’autochtonie italienne. L’auteur discute avec très grand intérêt des analyses ADN des dernières décennies (p. 41-45), celles concernant les Hommes comme celles étudiant des bovidés d’une race locale. Les résultats de ces études ainsi que la reprise des premières études peuvent avoir fait avancer un peu les choses … Mais ce chapitre n’est pas que celui des vieilles questions te des mythes originels, c’est aussi celui du passage de la civilisation villanovienne à la culture étrusque urbaine au VIIIe siècle avant J.-C., avec des phénomènes de synœcismes (rassemblement de villages pour former une ville) donnant naissance aux cités et une rarification des établissements aristocratiques autonomes. Avec l’essor des cités se développent aussi les contacts dans tout l’espace méditerranéen, avec un attrait particulier pour l’art oriental (ce que les spécialistes appellent la période orientalisante, au VIIe-VIe siècle). La fin du chapitre, dans sa volonté de faire des rapprochements entre migrations antiques et réfugiés du XXIe siècle, se fourvoie complètement, entre erreurs factuelles et propos au minimum aventureux (p. 45). Qu’a à voir la situation de l’Europe au néolithique avec le XXIe siècle ?

Quittant Tarquinia, L. Shipley nous emmène vers le Nord, à Vulci, pour détailler le mobilier très composite de la Tombe d’Isis. Des artefacts de Syrie, d’Anatolie et d’Egypte sont la preuve du réseau dans lequel les occupants de la tombe se mouvaient à la fin du VIIe siècle. L’auteur s’aventure dans l’époque napoléonienne (Lucien Bonaparte a fait faire beaucoup de travaux archéologiques en Italie centrale) dans le cadre de ses interrogations sur l’exotisme. Déjà sur le XIXe siècle, tout n’est pas au point : L. Bonaparte n’a pas épousé une ancienne reine d’Etrurie (p. 54). De plus, comparer des princes étrusques (dont l’auteur surinterprète l’usage du terme dans un sens littéraliste qu’il n’a jamais eu) aux maharadjas n’a aucun sens. Mais quand on glisse de la Tombe d’Isis à l’EI (ISIS en anglais), c’est le fin du fin …

Le quatrième chapitre nous conduit toujours plus au Nord, cette fois-ci vers la cité de Chiusi et son kylix (coupe à boire) athénien. Les vases étrusques furent très en vogue, au point de déclencher une étruscomanie au XVIIIe siècle. Mais vînt J. Winckelmann, dont les travaux démontrèrent l’origine grecque de ce que l’on pensait des œuvres étrusques. Les Etrusques, pales imitateurs, barbares ou même voleurs, étaient forcément inférieurs aux Grecs ou aux Romains aux yeux de J. Winckelmann. Leur place dans les sciences de l’Antiquité (p. 70) s’en ressent encore aujourd’hui … L. Shipley développe ensuite quelques idées sur le commerce gréco-étrusque, dont le fait que les potiers et peintres athéniens produisent spécifiquement pour le marché étrusque, et que cela influence aussi leur production destinée aux Athéniens. Différentes interprétations peuvent ainsi être passés en revue.

Le chapitre suivant est centré sur l’un des sites iconiques de l’étruscologie, la résidence aristocratique de Poggio Civitate. L. Shipley détaille les différentes phases du site (où elle a travaillé p. 90), sa décoration et ses différentes fonctions. La présence de chevaux est attestée, mais jusqu’en 2012, on n’avait nulle trace des habitations des ouvriers et du personnel du complexe (p. 88). Le sixième chapitre explore un thème classique, lui aussi visiblement discuté dès l’Antiquité : la femme étrusque. Il y est question d’une tombe découverte à Tarquinia en 2013, celle dite de l’Aryballe suspendue, contenant les reste d’une femme munie d’attributs guerrier. A partir de cette découverte, exceptionnelle, l’auteur élargit son propos à la place de la femme dans la société étrusque, dans les couches les plus favorisées (p. 99) mais aussi dans des strates sociales plus basses. Une comparaison avec la vision romaine est faite p. 102, où dans le récit de la fin des rois étrusques de Rome voit opposée à la femme étrusque qui banquette la pieuse vertu de Lucrèce la romaine, filant sa laine (la figure de Tanaquil, épouse de Tarquin l’Ancien, est curieusement épargnée, p. 103). La tradition littéraire européenne s’est emparée des figures de Tanaquil et de sa petite-fille Tullia, mais surtout pour y inscrire un personnage intrigant et à la morale relâchée. La fin du chapitre, échafaudant un parallèle entre femme étrusque et publication de photos intimes sur internet. Dire que dans l’introduction on parle des péchés d’anachronismes du XIXe siècle …

Le principal problème de l’étruscologie jusqu’à récemment fut sa grande dépendance aux contextes funéraires (septième chapitre). Mais là encore, dans les dernières décennies, le paysage a beaucoup changé. Si beaucoup des villes étrusques ne sont pas accessibles aux recherches archéologiques parce que leurs sites sont toujours des sites urbains (qui souhaite détruire la Pérouse de la Renaissance ?), la ville de Marzabotto (dénommée Kainua en étrusque, p. 110, une découverte qui a à peine trois ans !), entre Florence et Bologne, peut être étudiée plus à loisir. De plan hippodaméen (mais plus ancienne qu’Hippodamos de Milet), c’est une colonie au même titre que Spina sur la côte adriatique. En plus des maisons rectangulaires regroupées par îlots, la ville a bien sûr des espaces sacrés et d’assemblée (p. 113). L. Shipley discute l’appartenance de Marzabotto à la catégorie « ville » selon les critères romains et grecs, avant d’évoquer de manière succincte les différentes magistratures étrusques. Le chapitre s’achève, presque inutilement, sur le récit du massacre e Marzabotto, qui vit périr 770 personnes de tous âges en 1944 (p. 121).

Le huitième chapitre de ce livre nous voit quitter les montagnes du Nord pour revenir en Etrurie intérieure, auprès des falaises de tuf de cité d’Orvieto. Dans la nécropole de la Cannicella à la sortie de la ville, a été retrouvée une statue de marbre blanc haute d’un mètre représentant une femme nue (produite vraisemblablement à la fin du Vie siècle, bien antérieurement à l’Aphrodite de Cnide, le premier exemple grec, datée de 350-340 avant notre ère). C’est l’occasion pour L. Shipley de revenir sur l’image de liberté sexuelle associée dès l’Antiquité aux Etrusques (mais en étant imprécise sur les utilisations variées du terme de Vénus …). Cette sensualité étrusque, pas mise en rapport avec les représentations contemporaines grecques ou romaines (p. 124), a beaucoup inspiré l’auteur D. H. Lawrence, qui prend le contrepied d’un Théopompe très rigoriste. Ce chapitre court renseigne bien sur les interprétations possibles que l’on peut avoir de la statue de la Vénus de Cannicella (qui en elle-même est un artefact de tout premier ordre sur de nombreux plans), mais les explications tripartites de la fin du chapitre (et Dieu sait à quel point nous estimons G. Dumézil) sont loin d’être convaincantes (p. 158 et p. 174).

Le chapitre suivant s’attaque au mystère suivant, celui de l’écriture. Il a fait couler beaucoup d’encre depuis plus d’un siècle et est un passage obligé de n’importe quel ouvrage de vulgarisation. L’auteur brosse à grand traits le paysage : il reste très peu de textes étrusques (p. 139), principalement parce que les supports d’écriture étaient périssables. Le second problème est que le langage, s’il est lisible (l’alphabet est d’origine grecque), est difficilement compréhensible. De nombreux rapprochements ont été tentés (la langue étrusque n’est pas partie du groupe indo-européen), avec presque toutes les langues connues sans doute, mais pour l’instant rien n’a été concluant (même si, pour le louvite, on pourrait avoir une parenté). La méthode combinatoire semble donner plus de résultats, mais a l’inconvénient de la lenteur (p.145). L. Shipley présente ensuite l’un des textes étrusques les plus célèbres : les tablettes en or de Pyrgi, une bilingue étrusco-punique à la gloire du rénovateur du sanctuaire portuaire de la cité de Caere. Et si c’est affiché de manière aussi voyante, c’est qu’il y a des gens pour le lire (p. 148), en grand nombre.

Le neuvième chapitre en parle, mais ce n’est que dans le dixième que l’on propose au lecteur une présentation de la spécialité étrusque qui a survécu jusque dans l’âge paléochrétien : la divination. Cette dernière aurait été révélée aux Etrusques par le prophète Tagès, le vieux jeune homme (p. 155). L’auteur fait la description de plusieurs rites, reparle des rituels tripartites déjà évoqués plus haut, de quelques sanctuaires et de divinités étrusques, mais il manque beaucoup d’aspects de la thématique. Le tournant du IVe siècle est mentionné, mais sans aller vers l’explication (p.162), sans envisager un éventuel polycentrisme dans la relation entre la déesse étrusque Uni et la déesse phénicienne Astarté (p. 161). Les soi-disantes réminiscences étrusques dans la peinture médiévale n’arrivent pas à convaincre (p. 164 et p. 175).

Le dernier chapitre, enfin, traite de la Fin. Pour un peuple qui a tant investi dans l’apparat funéraire, c’est évidemment un thème central. L’auteur ne développe pas outre mesure les différentes conceptions de l’au-delà repérable dans la production artistique étrusque mais se concentre sur les démons (Charun, Vanth) et prend pour artefact central dans ce chapitre la tombe dite du Chariot infernal de Sarteano (découverte en 2003). L’interprétation est pessimiste, presque victimiste, et on n’est pas obligé d’adhérer à tout ce qu’écrit l’auteur (surtout pour l’intégration des croyances étrusques à Rome p. 163 ou sur Charun p. 174). L. Shipley poursuit avec l’utilisation des Etrusques dans le cinéma horrifique, pour finir dans une brève conclusion sur un ton élégiaque et plein d’espoir. Le volume est complété par de nombreuses pages de notes, par une bibliographie indicative et un court index.

Le lecteur, avec cette lecture du plus grand intérêt, accomplit avec l’aide de l’auteur un triple voyage : géographique, temporel, épistémologique. L’écriture est claire, alerte, dans des chapitres admirablement construits. Si nous avons été critiques avec la volonté de faire des parallèles avec le XXIe siècle (mais c’est dans le cahier des charges de la collection), tout non plus n’est pas à négliger de ce côté-là. Le chapitre sur l’écriture est l’un des meilleurs, dans un livre pourtant d’une très haute tenue. On peut regretter quelques erreurs, attribuable à l’inattention comme la mauvaise localisation du sarcophage de Seianti Hanunia Tlesnasa (à Florence et pas à Londres p. 178), ou à la volonté, forcée, en fin de chapitre de faire des parallèles (Jésus de Nazareth qualifié de prophète p. 163 pour en faire un pendant à Tagès). Pour la datation de mythes grâce à des drainages (p. 156), là nous n’avons pas d’explications plausibles … Un très grand soin a été apporté aux notes, qui ne contiennent pas que des références bibliographiques, mais sont un véritable plus pour le lecteur curieux. Il y a de nombreuses illustrations couleurs dans le texte.

De petits défauts mais rien qui puisse atteindre la très haute qualité générale de ce livre qui réussit à allier acquis de la recherche et nouveautés importantes, sérieux et humour, clarté et enthousiasme communicatif mais aussi hauteur de vue et approches originales.

(la dernière entrée de la chronologie qui ouvre ce livre mentionne V. Raggi comme la première femme à régner, dans un style certes différent, sur Rome depuis Tullia … 8,5)

Strade degli Etruschi

Vie e mezzi di communicazione nell’antica Etruria.
Recueil d’articles sur les voies et les moyens de transport en Etrurie, dirigé par Mauro Cristofani.

Quand faire juste des routes est trop simple.

Trente-trois ans après sa parution, ce livre volumineux et pesant continue de faire autorité. Produit à l’occasion des travaux autoroutiers de l’A1 (le tracé reliant Naples à Milan est achevé en 1988, pour des travaux débutés en 1956), il a pour but de démontrer la permanence des tracés et la filiation entre l’ingénierie étrusco-romaine et l’italienne du milieu du XXe siècle. Mais si le livre rappelle plusieurs fois qui l’a commissionné, il n’est pas qu’une ode à l’autoroute du soleil et ses six chapitres ambitionnent de faire entrevoir au lecteur quelques richesses insoupçonnées.

M. Cristofani, après une rapide présentation du volume, se charge de l’entame avec un article sur les itinéraires terrestres et maritimes. Il est d’abord rappelé l’étendue des territoires contrôlés par les Etrusques au moment de leur plus grande extension et leur thalassocratie. Puis on passe aux liens entre les différents centres, pour passer ensuite aux reprises de routes déjà existantes par le réseau romain. De très riches illustrations complètent l’article (comme pour tous les articles de ce volume), avec ici en plus des cartes, peu précises, mais donnant une bonne idée des axes de communication, tant sur terre que sur mer.

Le second article, signé du même auteur, passe très rapidement en revue les types de véhicules en usage en Etrurie préromaine. Là encore, de nombreuses illustrations font suite à l’article, montrant différents artefacts ou des reconstructions de navires. Une légende nous pose ici problème (p. 68), disant voir une apothéose sur un parement de char en bronze alors qu’il nous semble plus être la représentation d’un épisode légendaire ou mythologique (un char de chevaux ailés, comme ceux de l’Ara della Regina à Tarquinia) comme sur le second parement du même char (p. 70-71).

L’article suivant, écrit par Paola Moscati, est consacré aux routes qui parcourent le territoire des Falisques, ce peuple allié des Etrusques, ethniquement latin mais très profondément étrucisé. Les différentes voies sont commentées, qu’elles soient archéologiquement avérées dans leur tracé ou à l’état de conjectures, avec peu d’éléments concrets. Deux cartes aident heureusement à les situer, et les photos montrent à voir des réalisations de l’art hydrologique étrusque. L’article est suivi d’illustrations d’artefacts de différents types produit en territoire falisque.

L’article suivant (écrit par Giuliana Nardi) ramène le lecteur en terrain plus connu, sur le territoire de la cité de Caere. Le centre urbain est bien entendu relié à ses trois ports et à ses voisines Tarquinia et Véies, mais l’auteur préfère se concentrer sur le réseau viaire dans la périphérie de l’habitat, comprenant notamment les routes menant ou traversant les nécropoles et le système de drainage qui souvent l’accompagne (dont quelques voies taillées dans le roc). Malheureusement, les deux cartes (p. 164-165) qui accompagnent cet article sont très difficilement lisibles. Du coup, impossible de replacer sur les cartes les ponts, les portes et autres éléments dont parle l’auteur. De même, dans les photos qui font compagnie à l’article, souvent la légende souhaite porter l’attention du lecteur sur un élément qu’il aurait été bon d’indiquer sur l’illustration (certaines sont étrangement nébuleuses par ailleurs p. 212).

Le dernier article effectue un retour vers les moyens de transport avec pour thème le char d’Ischia di Castro, découvert en 1967 par une équipe archéologique belge. L’article replace la tombe dans son environnement avant de détailler les mesures de conservation dont a bénéficié le char, découvert avec des éléments ligneux. Sa décoration de bronze est elle aussi analysée, et bien entendu comparée au char de Monteleone de Spolète. C’est un article assez court, avec de nombreuses vues de détail et qui s’achève sur une note technique.

La qualité des cartes est hélas le point noir de ce livre, à la lecture parfois sèche (il faut connaître intimement le territoire falisque …). Ces cartes posent plus de questions qu’elles n’aident à en résoudre, ce qui n’est pas négatif en soit, sauf si l’on doit s’échiner à comprendre ce que l’auteur a voulu dire et ne pas vouloir se cantonner à ses propres réflexions. La carte de la p. 44 comporte deux fois la cité de Populonia, signe tout de même d’une attention moindre.

Le livre a bien entendu vieilli, pour la simple raison que l’archéologie du transport n’a pas chômé depuis 1985. On peut citer dans le domaine maritime la fouille très importante du navire vraisemblablement étrusque de la presqu’île de Giens en 1998. Pour la partie terrestre, l’étude de J. H. Crouwel pose de très solides bases (ici). Mais pour les voies, il ne semble pas qu’il y ait eu une mise à jour depuis …

(ce modelé de la tête du temple A de Pyrgi p. 152 … 7)