How Western Soldiers Fight

Organizational Routines in Multinational Missions
Essai sur le comportement de troupes occidentales en mission par Cornelius Friesendorf.

Ombres et lumières.

Quels sont les facteurs qui conduisent les soldats en opération à agir comme ils le font ? Sont-ils en premier lieu influencés par la doctrine, par les institutions politiques nationales ou par ce que des instances internationales peuvent attendre d’eux ? Cornelius Friesendorf explore dans ce livre la part des routines dans la prise de décision et la conduite des opérations, sans pour autant exclure ces facteurs susmentionnés. Voulant s’extraire des débats universitaires sur la notion de culture, il emploie le concept de routine comme une partie d’une culture, un schéma de comportements continuellement répétés (ou des capacités organisationnelles déclenchées par des stimuli adéquats). Plus le répertoire des routines est important, plus une organisation peut effectuer de tâches. Ainsi l’auteur s’intéresse non pas à la stratégie mais à son implémentation sur le terrain, en étudiant les usages de la force mais pas sa préparation (renseignement).

Nanti de sa grille de lecture (types de routines, formes possibles d’adaptation à une nouvelle situation), l’auteur analyse les réactions de quatre armées à des situation qu’il décrit comme non conventionnelles (qu’il faut ici comprendre ici comme ne ressortant pas du combat mais de la lutte contre le crime violent ou la gestion de foules hostiles) : l’armée des Etats-Unis d’Amérique, l’armée britannique, l’armée allemande et les Carabiniers italiens. Considérant environ vingt années d’opérations de ces quatre entités militaires, l’auteur suit leurs évolutions d’abord en Bosnie, puis au Kosovo et enfin en Afghanistan.

En Bosnie, les Etats-Unis, dès le départ peu emballés par la mission, se contentent de démonstrations de force et ne se préoccupent pas de combattre le crime violent (malgré les textes définissant la mission, aux formulations certes vagues et au grand regret de l’auteur). La protection positive des populations en pâtit. Les Britanniques (à l’expérience nord-irlandaise encore fraîche) sont plus actifs contre le crime, arrêtant plusieurs suspects de crime de guerre tout comme les Allemands. Ces derniers, dont c’est la première mission hors du pays depuis 1945, rechignent tout de même à quitter leurs bases et à patrouiller (sous l’effet premier du micromanagement du niveau politique). Les Carabiniers sont quant à eux dans leur élément et d’une certaine manière agissent comme sur leur sol national. Leurs actions sont bien plus problématiques quand ils commencent à suppléer les Etats-Unis dans leur lutte contre le terrorisme et leurs violations des droits de l’Homme après 2001.

Au Kosovo, les postures des différents contingents évoluent peu. Les Etats-Unis ont toujours comme premier objectif la protection de leurs forces. La lutte contre le crime se fait avec cet objectif, si bien qu’il peut arriver qu’un hélicoptère Apache soit dépêché pour empêcher un pillage (p. 143) ou que des gaz lacrymogènes soit largués d’hélicoptères pour disperser une émeute. Les Etats-Unis font aussi le choix de déléguer la fonction de police dans leur secteur au Corps de Protection du Kosovo, émanation directe de l’UCK, contre la volonté de l’ONU. Avec le remplacement de troupes d’active par la Garde Nationale, l’auteur observe un rééquilibrage des objectifs en faveur de la sécurité des populations civiles. Les Britanniques optent pour l’autre extrémité du spectre. Leurs troupes vont à pied, sans gilet pare-balle et font de l’îlotage. Ils vont jusqu’á dormir dans des appartements serbes pour protéger leurs habitants. L’armée allemande veut certes défendre les droits de l’Homme au Kosovo, mais sa propre sécurité est au premier rang de ses préoccupations, au détriment des minorités. Son impréparation devant des foules hostiles est telle que des unités se laissent enfermer dans leur base par des émeutiers en 2004. Très critique d’un commandement allemand craignant pour sa carrière, C. Friesendorf note toutefois les capacités d’adaptation de l’armée allemande, tant en entraînement qu’en matériel après 2004. Les Carabiniers sont au Kosovo en pointe contre le crime et investis dans la formation de la police locale, mais pour l’auteur, cela a aussi eu des conséquences négative sur la protection des minorités : des Serbes à qui on a pris leurs armes illégales se retrouvaient en état de danger face à une police kosovare majoritairement composée d’anciens combattants de l’UCK.

L’Afghanistan est le cadre de la troisième opération multinationale considérée par l’auteur. Pour les Etats-Unis, passé la première phase de destruction des Talibans et des combattants d’Al Qaida, il faut aussi prendre en considération la population locale pour améliorer sa sécurité. De ce point de vue, la publication de la doctrine étatsunienne de contre-insurrection en 2006 marque un changement, mais qui n’est cependant pas total. A tel point que la définition de ce qu’est un chef taliban à éliminer devint très large (les officiers ont des objectifs chiffrés) et malgré un accent mis sur la protection de la population, les pertes civiles ont augmenté après 2006. Les troupes britanniques ne font pas mieux en termes de pertes civiles et si les Allemands s’en sortent un peu mieux, c’est surtout du fait de leur réticence à combattre (qui viennent en premier lieu de Berlin). Enfin, les Carabiniers sont chargés de la formation de la police afghane, au profil tellement militarisé qu’elle pense pouvoir se doter d’artillerie. Dans un pays où 75 policiers sont assassinés chaque semaine, les bases du combat enseignées par les Carabiniers semblent adaptées à la situation pour l’auteur.

La conclusion propose une analyse générale de la part des routines dans les comportements des soldats et met en avant quelques voies de recherche dans l’analyse du comportement des forces armées en se basant sur plus de microanalyse et un accent mis sur la multicausalité. Pour peut-être idéalistiquement aller vers une meilleure protection des populations par une répartition plus égalitaire des risques encourus par les troupes étrangères et la population dans les interventions militaires ?

Avec cet ouvrage au titre légèrement trompeur, C. Friesendorf met en perspective les entretiens qu’il a pu conduire entre 2005 et 2013 et décrit avec précision les différentes approches des armées prenant part à une opération militaire multinationale. Allant au-delà de l’étude des différentes doctrines et de leurs évolutions dans le temps, il analyse les interactions entre celles-ci et le terrain en se demandant in fine si le résultat a été positif pour les populations locales. Même si l’on peut discuter de définitions présentées, comme celles de la non-conventionnalité ou de l’asymétrie, ce livre est assis sur de très solides fondations théoriques permettant une analyse de grande clarté des données de terrain, recueillies à tous les niveaux et pendant une longue période.

Au moment où l’intervention otanienne prend fin en Afghanistan et que de moins en moins de militaires en activité ont connu les opérations dans les Balkans, C. Friesendorf transforme avec une grande précision la mémoire de ces opérations en processus historique, à charge pour le lecteur de placer d’autres armées ayant agi sur ces théâtres sur le spectre ainsi élaboré ou d’interroger ses propres routines et leurs origines.

(un Apache pour faire fuir des pillards, il y a une certaine ironie … 8)

Scarlett et Novak

Nouvelle d’anticipation d’Alain Damasio.

The Enemy Within.

Novak se fait courser. Pourquoi ? Il ne le sait. Pour le tabasser ? Le violer ? Son ordiphone l’aide dans sa fuite, le renseigne sur ses poursuivants, lui indique sa fréquence cardiaque, mais lui demande aussi s’il veut partager son nouveau record de vitesse avec ses amis. Est-ce vraiment le moment ? Ou ses poursuivants en veulent-ils à son ordiphone et à son assistante à la voix veloutée, nantie du nom de Scarlett ? Il doit la protéger.

Cette très courte nouvelle d’Alain Damasio (50 pages avec beaucoup de mise en page) est à ranger dans ses œuvres d’anticipation, de très courte anticipation. Elle partage quelques caractéristiques avec nombre de ses autres écrits et s’en démarque par d’autres. Première grosse différence, le texte est moins ciselé. Mais ce ne signifie pas pour autant que ce n’est pas aussi bien écrit que ses autres écrits aux temps de maturation plus long. Pas de formules marquantes cette fois-ci. Au rayon des ressemblances, on retrouvera un monde proche des Furtifs, entre méga-corporations, hyperconnexion, bagues de données et privatisation de la ville. La paternité, thème central des Furtifs, est évoquée dans le poème en fin de volume (Une vie passée à caresser une vitre). Comme souvent encore, la forme rejoint le fond avec un tournage de pages frénétique qui rend très bien l’idée de course.

Quelques habiles références parsèment le texte, renvoyant à d’autres œuvres sur le même thème (Scarlett, pour la voix du film Her sorti en 2013), interloquant le lecteur (pourquoi un personnage s’appelle-t-il donc Davor Suker ?) en cherchant même sa confusion, ou encore faisant référence au premier lieu de publication de la nouvelle (01Darknet pour le site internet 01net, mais avec des modifications dans la version papier, comme à la p. 14).

Un bonbon très agréable, qui veut montrer que la réversibilité n’est pas impossible.

(est-ce que les locuteurs d’une même langue ne peuvent même plus se comprendre à cause de l’envahissante béquille technologique ? … 8)

Black Earth

The Holocaust as History and Warning
Essai d’histoire de l’Holocauste par Timothy Snyder. En francais sous le titre Terre noire : L’Holocauste, et pourquoi il peut se répéter.

Le livre est plus noir que la couverture.

Le sujet a bénéficié de beaucoup d’attention de la part des spécialistes et pourtant il est toujours autant nécessaire de pouvoir lire des ouvrages qui font le lien entre toutes les études. Mais T. Snyder ne se contente pas de la collation des différentes sources et analyses et offre au lecteur des perspectives peu communes, tant au niveau de la chronologie que de la compréhension générale de ce phénomène central du XXe siècle.

Pour commencer par le commencement, l’introduction s’occupe la source de l’Holocauste : la pensée hitlérienne. Celle-ci ne cache nullement son orientation, sans pour autant prendre parti sur les moyens : l’Allemagne doit se débarrasser des Juifs qui l’empêchent par leur présence et les idées qu’ils véhiculent d’attendre le rang qui lui est promis comme race dans l’éternel combat pour la survie et le bien-être, à savoir le premier. Puisque l’homme est un animal (comme l’a montré le darwinisme), il faut faire coïncider la science et la politique (p. 5). Le premier chapitre poursuit l’exploration du contexte idéologique en mettant en avant le parallèle fait entre l’Allemagne et les Etats-Unis (possible avec la mondialisation du début du XXe siècle), un pays au niveau de vie fabuleux, ayant l’espace pour sa population et qui a su se débarrasser presque complètement des « êtres inférieurs » qui occupaient ce même espace : les Indiens. Pour son espace vital nécessaire, son biotope (Lebensraum), la race allemande n’aurait alors, compte tenu de la domination anglo-saxonne des mers, que comme solution de coloniser l’Est européen (avec en exemple aussi les expériences colonisatrices allemandes en Afrique, de loin pas douces). La conquête doit donc se faire jusqu’à l’Oural (en détruisant l’URSS « judéobolchévique »), en redirigeant la nourriture produite sur place vers l’Allemagne (le blocus allié de la Première Guerre Mondiale a fait des dizaines de milliers de morts) et donc en affamant les populations locales (comme en 1916 déjà, p. 17). De ce point de vue, A. Hitler est à la fois colonialiste et anticolonialiste (p. 8).

Posé le contexte idéologique, T. Snyder passe ensuite au contexte géopolitique et analyse en détail les différentes phases dans les relations à trois entre Berlin, Moscou et Varsovie dans les années 1930. La Pologne a essayé dans ces années de maintenir une position de neutralité entre ses deux voisins aux visées révisionnistes (plus de 100 000 citoyens soviétiques ethniquement polonais sont éliminés avant la guerre p. 57). Plus étonnamment, elle soutenait aussi avant la guerre le sionisme combattant et terroriste de V. Jabotinsky (camps d’entrainement p. 64) tout en souhaitant se rapprocher de la Grande-Bretagne (pourtant la victime de ces mêmes terroristes en Palestine p. 67). En fin de compte, ce sont l’URSS et les Nazis qui s’entendirent pour se partager la Pologne …

Le quatrième chapitre du livre marque le début de l’argument principal de l’auteur : c’est la fin des Etats en Europe centrale et orientale qui permet l’Holocauste. T. Snyder démontre clairement à notre sens la gradation par l’expérience qui lie ces deux phénomènes. L’Autriche, la Tchécoslovaquie, la Pologne, à chaque fois c’est une étape de plus dans la répression, à chaque fois de plus en plus longtemps. En Pologne, l’Etat détruit n’est à dessein pas remplacé par un autre Etat (l’Autriche est intégrée au Reich assez rapidement) et donc les éliminations (de Juifs et de personnes jugées comme dangereuses par les Nazis) qui ont duré des jours en Autriche durent le temps de la guerre, d’abord à l’Ouest du pays puis à l’Est avec l’opération Barbarossa, dans un territoire déjà parcouru par les assassinats ciblés (mais de masse) et les déportations (les pays doublement occupés comme les dénomme l’auteur). En Pologne, mais aussi en Biélorussie et en Ukraine, il n’y a plus de légalité et il n’y a plus que la survie qui compte (et l’enrichissement rapide), au prix de l’extermination de la minorité juive (avec participations locales à divers titres). Des pogroms sont suscités (mais pas toujours avec succès selon les lieux et le contexte sociopolitique local p. 160), les polices locales sont restructurées et leurs missions réorientées. Néanmoins, comme le démontre l’auteur, si le résultat pour les communautés juives locales (mais aussi les handicapés et d’autres personnes considérées comme indignes de vivre) est le même, les processus empruntent des voies différentes selon les pays, conséquences de leurs histoires récentes. L’auteur se penche pour se faire aussi sur les trois pays baltes (le judéobolchévisme comme mythe rédempteur pour les collaborateurs des Soviets dans les pays baltes en 1941, p. 164 et p. 187) et donne de nombreux détails sur la répression et la déportation des Juifs par les Soviétiques (dans le cadre de la lutte contre le capitalisme, dans une sorte de réforme agraire par la dénonciation et la déportation p. 132).

Après les premiers mois de l’occupation nazie à l’Est, tout est déjà presque achevé et la survie des Juifs dans les territoires colonisés est devenue presque impossible tant le risque de dénonciation est omniprésent et le danger très réel pour ceux qui protègent ou ne dénoncent pas (une seule peine, la mort). C’est ce que l’auteur appelle le paradoxe d’Auschwitz : quand le camp d’extermination ouvre, sont qui y sont destinés (pas ceux qui y sont transportés) et vivent en Europe de l’Ouest ont plus de chances de survivre à la guerre que ceux qui vivent encore dans sa proximité. Et ce pour une seule raison : ils sont encore protégés par des Etats. Et pourtant c’est ce camp d’extermination qui devient le symbole de l’Holocauste, principalement parce que le but était aussi d’y faire travailler des gens (dans un choix stratégique entre le travail des déportés ou le transfert des calories qu’ils consomment vers l’Allemagne, p. 201) et qu’il y a des survivants (en plus grand nombre que pour les tueries au bord de fosses, aux rescapés infinitésimaux comme ceux entrés dans les camps d’extermination de Sobibor, Treblinka, Chelmno ou Belzec). Ce sont la bureaucratie, la citoyenneté et les besoins de la politique étrangère des Etats non détruits de l’Ouest de l’Europe qui sauvent beaucoup des Juifs du sort qui leur est réservé à Auschwitz.

Une fois ces bases posées, T. Snyder va plus profondément, en prenant plusieurs exemples en commençant par les Etats alliés aux Nazis que sont la Slovaquie, la Croatie ou la Roumanie (où les politiques d’extermination ont libre cours), l’Italie (où l’Holocauste ne démarre qu’après la chute de B. Mussolini en 1943), la France ou encore le Danemark (qui organise plus ou moins la fuite de ses sujets juifs vers la Suède neutre).

La dernière partie de ce conséquent livre de 640 pages est consacré aux gens qui sauvent des Juifs en Europe orientale, malgré les énormes risques. L’auteur les classe en plusieurs catégories. La première est celle des « sauveurs gris », en général des soldats, qui sauvent certains juifs mais en exécutent d’autres selon le lieu (y compris dans les Einsatzgruppen qui tuent par balle hommes, femmes et enfants par milliers en une journée). La seconde catégorie est celle des hommes ou femmes d’église (qui peuvent bénéficier du soutien de leurs ouailles) et des groupes de résistance et de partisans locaux, qui ont chacun pour eux d’appartenir à des organisations constituées dans un environnement sans Etat (Armée polonaise de l’Intérieur, partisans soviétiques, plus rarement encore nationalistes ukrainiens) et qui peuvent éventuellement recruter. La catégorie suivante est qualifiée de Justes par l’auteur et ceux-ci sauvent par intérêt personnel (d’ordre sentimentalo-sexuel ou économique par exemple) ou par simple humanité (la bonté en ces temps p. 313 et l’irrationalité du sauvetage p. 318). Une fin de livre appropriée sans doute.

Mais ce n’est pas réellement la fin … La conclusion met l’accent sur la non-unicité du génocide des Juifs en tant que phénomène historique et humain et sur le fait qu’un tel mécanisme pourrait bien resurgir si une crise frumentaire mondiale venait à surgir et que des responsables venaient à être désignés. Les années 2010 n’ont pas été sans problèmes de ce genre, comme en Egypte ou en Syrie par exemple. En Syrie, c’est sans nul doute une cause de la guerre civile. Et l’Etat peut paraître solide, il n’en est pas moins une patiente construction dont l’absence fait disparaître tout droit. Il reste des gens qui rêvent de ce genre de choses prévient l’auteur.

Au-delà des cartes dans le texte, ce volume est complété par d’abondantes notes (au système sans numérotation assez moyen), une bibliographie bien entendue très ample et un index étoffé.

Le point le plus le plus important du livre est de rappeler que les Nazis ont pour objectif de remplacer l’Etat par la race, mais que cet objectif n’est pas d’abord atteint en Allemagne mais bien à l’Est. L’Etat est clairement l’obstacle au plan des Nazis de se débarrasser des « éléments non-naturels » en Europe. Le lien direct entre l’échec de l’Opération Barbarossa et la Solution finale est de plus très clairement expliqué (et les unités de la Wehrmacht sont très vites autonomes pour ce qui est d’éliminer des gens p. 190). Le livre a aussi pour objectif de lutter contre une mémorialisation de l’Holocauste, où il n’y a plus qu’Auschwitz, et il y réussit assez bien (alors que le grand public soit censé découvrir la « Shoah par balles » à intervalles réguliers). Pour T. Snyder, l’histoire dans sa complexité et sa variété doit encore être présente dans la sphère publique non spécialisée. La différence entre le communisme et le nazisme est aussi patente dans cette étude : les exécuteurs soviétiques sont organisés, efficaces et seul le NKVD est chargé des basses œuvres, tandis que les Nazis sont dans l’improvisation et la massification des tueurs (chacun y est appelé, p. 123). C’est dans ce sens qu’il faut comprendre H. Arendt.

C’est un livre très rude mais agréable à lire au sens esthétique (par exemple p. 170 ou p. 285 sur l’Holocauste qui pave le chemin à l’occupation soviétique), avec des cartes nombreuses et très utiles (malgré l’erreur sur celle de la p. 197 concernant une Alsace non intégrée au Reich). La partie sur la France est peut-être un peu simpliste ou fait confiance au lecteur pour se rappeler qu’il y deux zones en France, une libre et une occupée, jusqu’en novembre 1942 (p. 246). L’auteur semble aussi laisser entendre, de manière fausse ou très incomplète, que ce sont les colonisateurs qui ont inventé les ethnies en Afrique, comme p. 329 dans le cas des Tutsis et des Hutus au Ruanda. Très concentré sur l’Europe centrale et orientale, ce livre est néanmoins un indispensable sur l’horreur meurtrière à grande échelle qui ravage la moitié d’un continent pendant de très longues années.

(les Polonais ne se nomment pas une Nation martyre sans aucun fondement … 8,5)